Tu aurais pu prév´nir un peu, mon s
alaud...
J´ai les doigts qui pèsent deux cent tonnes au pi
ano.
On s´en va pas comm´ça, à
pied,
Dans les prairies de l´au-de
là.
Les enfants d´la rue d´la Gaîté
N´en reviennent
pas, n´en reviennent
pas.
Lorsque j´avais trois sous à moi autrefois,
C´était pas pour ach´ter d´la marijuana.
J´courais chercher la partition
D´une de tes putains de chansons
Qui m´foutaient des crampes au poignet:
C´était le métier qui rentrait.
Pardonnez-moi si ce soir je vous tutoie:
Pour moi la Jeanne et l´Auvergnat, c´était toi.
Un phare de bonté s´est éteint
C´est pas les rockers de Libé
Ni les branleurs tout-parisiens
Qui vont pouvoir nous consoler.
J´t´imagine, le pas débonnaire, dans les cieux,
Passant sans ôter ton chapeau d´vant l´Bon Dieu...
Et d´ailleurs, on a beau savoir
Qu´il n´existe pas, quand bien même,
Comment ne pas lui en vouloir
Quand la mort nous prend ceux qu´on aime.
Si tu croises de l´autre côté d´l´horizon
L´ami Montaigne, Did´rot et François Villon,
Ils vont être contents de te voir:
L´éternité, c´est emmerdant
Sans un petit air de guitare
Pour faire danser les neiges d´antan.
Tu aurais pu prév´nir un peu, mon salaud.
De Vanves à la Gaîté, on a le coeur gros.
Il nous reste un bouquet d´accords
Pour te chanter dans nos mémoires.
Cent ans après, coquin de sort,
On gratt´ra encore nos guitares.