Axilis, allongé sur l´herbe de la rive, Suit d´un oeil nonchalant le clair ruisseau d´eau vive Qui court, léger d´aurore, au milieu des prés verts.
Le bois s´éveille à peine, et les champs sont déserts Axilis laisse errer sur sa flûte d´ébène Des doigts vagues qu´un même accord toujours ramène ; Car il semble exhalé, si limpide et si pur, Par des lèvres d´argent sur un roseau d´azur ! Aux pentes des coteaux flottent des vapeurs blanches Et le matin mouillé sourit nu dans les branches. Le pâtre qu´une ivresse envahit lentement Sent tressaillir sous lui la terre obscurément. Il boit l´haleine en fleur de la saison nouvelle ; Il boit le lait sacré de la bonne Cybèle. Eaux courantes, bois verts, feuillage frémissant Le clair frisson du monde a passé dans son sang !
Dans l´herbe humide et drue, il plonge son visage ; Il voudrait sur son coeur serrer le paysage. La vie autour de lui circule ; il voit courir Mille insectes fiévreux qu´un soir fera mourir. L´oiseau vole ; le vent souffle ; la feuille tremble ; Le ciel est de cristal Et voici qu´il lui semble Que son âme, pareille au reflet du bouleau, A fui, légère et vaine, au murmure de l´eau