Il est d´étranges soirs où les fleurs ont une âme, Où dans l´air énervé flotte du repentir, Où sur la vague lente et lourde d´un soupir Le coeur le plus secret aux lèvres vient mourir.
Il est d´étranges soirs, où les fleurs ont une âme, Et, ces soirs-là, je vais tendre comme une femme.
Il est de clairs matins, de roses se coiffant, Où l´âme a des gaietés d´eaux vives dans les roches, Où le coeur est un ciel de Pâques plein de cloches, Où la chair est sans tache et l´esprit sans reproches. Il est de clairs matins, de roses se coiffant, Ces matins-là, je vais joyeux comme un enfant.
Il est de mornes jours, où las de se connaître Le coeur, vieux de mille ans, s´assied sur son butin,
Où le plus cher passé semble un décor déteint, Où s´agite un minable et vague cabotin. Il est de mornes jours las du poids de connaître, Et, ces jours-là, je vais courbé comme un ancêtre.
Il est des nuits de doute, où l´angoisse vous tord, Où l´âme, au bout de la spirale descendue, Pâle et sur l´infini terrible suspendue, Sent le vent de l´abîme, et recule éperdue ! Il est des nuits de doute, où l´angoisse vous tord, Et, ces nuits-là, je suis dans l´ombre comme un mort.