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Artiste : Alexandre Poulin
Titre : La Dernière Lettre
On dit que la guerre sera bientôt finie
En tout cas j´espère
Si tu savais comme j´m´ennuie
J´ai perdu jusqu´à mon grand frère
J´lai vu mourir, couché dans la clairière

Dans son dernier souffle il m´a dit :
Hey, tu prendras soin de ma douce
Astheure que mes chums sont tous partis
Qui prendra soin de toi quand j´le serai aussi

Des fois j´aurais envie de prier
Pour que le ciel me ramène vers toi
Mais j´ai tué tellement de monde
Comment veux-tu que Dieu m´réponde
Alors j´m´accroche à toi, ma douce amie
À la lueur dans la grange la nuit ou je t´ai prise
Au sourire que tu m´as fait
Quand tu m´as dit que tu m´attendrais

Ici il fait plus froid que dans mon roman de Jules Verne
Y´a jusqu´à un marché noir de couvertes de laine

Mais moi j´ai juste besoin de ton foulard chaud
Pour garder mon coeur en un seul morceau
Pis l´courrier est pas vite vite
Déjà 3 mois que je suis sans nouvelles
Je t´imagine jouer avec la p´tite,
En accrochant son bas de noël

Comment faire l´amour dans le noir
Pourrais donner autant de lumière
Y´a qu´en photo que j´ai pu la voir
Pourtant c´est d´elle dont je suis le plus fier
J´t´en prie dis-lui jamais que son père était un assassin
Que pour récolter la paix, y´était semeur d´orphelins

Mais y´a pu grand chose qui t´inquiète
Quand tu sais que la mort te guette

Ah pis j´connais trop bien sa place
Est juste là dans l´gun du gars d´en face,
Des fois j´me dis que lui aussi,
Une douce amie l´attend dans son pays
Mais je sais ben que si je tire pas,
C´est moi qui te reverra pas,
Ça fait que j´ferme les yeux, pis j´entend l´coup
Quand je les rouvre d´habitude
Le gars est à genoux
Mais ce matin, j´ai pas pu
C´tait juste un gamin caché au coin d´une rue

J´suis ptête ben devenu un tueur
Mais j´serai jamais un tueur d´enfants
Dans ses yeux j´ai vu la peur,
Pis j´ai vu la p´tite en même temps
J´ai baissé mon fusil

En une seconde le p´tit gars y´a toute compris
J´ai reculé tout doucement
Lui pour tirer, y´a pris son temps

J´me sens comme dans un poème de Rimbaud
Quand je sens couler tout ce sang chaud
J´ai froid dans l´âme même au-delà
Pis ton foulard peut pu rien contre ça

Demain quand les gars trouveront mon corps
Ils trouveront aussi cette lettre dans ma poche
Maintenant c´est clair que je serai mort
J´vois la lumière au bout du croche,
Et je prend le peu d´énergie qui me reste
Pour t´écrire ma dernière lettre
J´y glisserai mon harmonica
Dis à la p´tite c´est le cadeau de son papa
J´en jouerai peut-être quelque notes

Quand je t´aurai écris mes derniers mots
Après je la glisserai dans l´enveloppe
Pis je tiendrai ton foulard comme un drapeau.