Lorsque dans le désert la cavale sauvage, Après trois jours de marche, attend un jour d´orage
Pour boire l´eau du ciel sur ses palmiers poudreux, Le soleil est de plomb, les palmiers en silence Sous leur ciel embrasé penchent leurs longs cheveux ; Elle cherche son puits dans le désert immense, Le soleil l´a séché ; sur le rocher brûlant, Les lions hérissés dorment en grommelant. Elle se sent fléchir ; ses narines qui saignent S´enfoncent dans le sable, et le sable altéré Vient boire avidement son sang décoloré. Alors elle se couche, et ses grands yeux s´éteignent, Et le pâle désert roule sur son enfant Les flots silencieux de son linceul mouvant.
Elle ne savait pas, lorsque les caravanes Avec leurs chameliers passaient sous les platanes,
Qu´elle n´avait qu´à suivre et qu´à baisser le front, Pour trouver à Bagdad de fraîches écuries, Des râteliers dorés, des luzernes fleuries, Et des puits dont le ciel n´a jamais vu le fond.
Si Dieu nous a tirés tous de la même fange, Certe, il a dû pétrir dans une argile étrange Et sécher aux rayons d´un soleil irrité Cet être, quel qu´il soit, ou l´aigle, ou l´hirondelle, Qui ne saurait plier ni son cou ni son aile, Et qui n´a pour tout bien qu´un mot : la liberté. [...]