Par la lande et l´ajonc, Gardeuse de dindons, Elle allait en balançant sa cotte, Pointue comme un chardon, Grêlée comme un poêlon,
Ceux d´ici l´appelaient la Roussotte
Son vrai nom, Sa maison, Ses pensées, de pauvre sauvageonne, Ses bonheurs, Ses douleurs, Qui l´ai sut, qui l´ait compris ? Personne
Vint un jour de printemps, Où la chétive enfant, Comme éclate un bourgeon d´aubépine, Vint à s´épanouir, Divinement fleurir Elle fut désormais , la Rouquine
Ses désirs, Ses soupirs,
Les émois de sa poitrine ronde, Ses ardeurs, Ses langueurs, Qui l´ait sut, qui l´ai pris ? Tout le monde.
Sous l´églantier amer, Au vent noir de l´hiver, Que son souffle maudit nous emporte ! On la trouva gisante, Inondée de son sang, Oh ! Vous tous, notre Rouquine est morte
Corps si blanc, Corps charmant, Sur la langue où Satan vagabonde, Qui t´as tuée, T´as navrée ? Le vent noir a sifflé : "Tout le monde ! "
Quand revint le printemps, Un tendre rosier blanc, A fleuri, radieux, sur sa tombe, Et la voix de l´enfant, Dans son parfum errant, A frémi comme un vol de colombe
Je passais, Je m´en vais, Au pays où le cœur s´abandonne, Oubliez, Vous rêviez, Mon vrai nom, Je vous le dis : "Personne"