Pourquoi de tes regards percer ainsi mon âme ? Baisse, oh ! baisse tes yeux pleins d´une chaste flamme : Baisse-les, ou je meurs. Viens plutôt, lève-toi ! Mets ta main dans la mienne,
Que mon bras arrondi t´entoure et te soutienne Sur ces tapis de fleurs.
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Aux bords d´un lac d´azur il est une colline Dont le front verdoyant légèrement s´incline Pour contempler les eaux ; Le regard du soleil tout le jour la caresse, Et l´haleine de l´onde y fait flotter sans cesse Les ombres des rameaux.
Entourant de ses plis deux chênes qu´elle embrasse, Une vigne sauvage à leurs rameaux s´enlace, Et, couronnant leurs fronts, De sa pâle verdure éclaircit leur feuillage, Puis sur des champs coupés de lumière et d´ombrage
Court en riants festons.
Là, dans les flancs creusés d´un rocher qui surplombe, S´ouvre une grotte obscure, un nid où la colombe Aime à gémir d´amour ; La vigne, le figuier, la voilent, la tapissent, Et les rayons du ciel, qui lentement s´y glissent, Y mesurent le jour.
La nuit et la fraîcheur de ces ombres discrètes Conservent plus longtemps aux pâles violettes Leurs timides couleurs ; Une source plaintive en habite la voûte, Et semble sur vos fronts distiller goutte à goutte
Des accords et des pleurs.
Le regard, à travers ce rideau de verdure, Ne voit rien que le ciel et l´onde qu´il azure ; Et sur le sein des eaux Les voiles du pêcheur, qui, couvrant sa nacelle, Fendent ce ciel limpide, et battent comme l´aile Des rapides oiseaux.
L´oreille n´entend rien qu´une vague plaintive Qui, comme un long baiser, murmure sur sa rive, Ou la voix des zéphyrs, Ou les sons cadencés que gémit Philomèle, Ou l´écho du rocher, dont un soupir se mêle À nos propres soupirs.