💃🎤 Paroles de chanson Française et Internationnales 🎤💃

 A   B   C   D   E   F   G   H   I   J   K   L   M   N   O   P   Q   R   S   T   U   V   W   X   Y   Z   0   1   2   3   4   5   6   7   8   9 
Artiste : Alphonse De Lamartine
Titre : L´humanité suite de Jehova
A de plus hauts degrés de l´échelle de l´être
En traits plus éclatants Jehova va paraître,
La nuit qui le voilait ici s´évanouit !
Voyez aux purs rayons de l´amour qui va naître
La vierge qui s´épanouit !

Elle n´éblouit pas encore
L´oeil fasciné qu´elle suspend,
On voit qu´elle-même elle ignore
La volupté qu´elle répand ;
Pareille, en sa fleur virginale,
A l´heure pure et matinale
Qui suit l´ombre et que le jour suit,
Doublement belle à la paupière,
Et des splendeurs de la lumière
Et des mystères de la nuit !

Son front léger s´élève et plane
Sur un cou flexible, élancé,
Comme sur le flot diaphane
Un cygne mollement bercé ;
Sous la voûte à peine décrite
De ce temple où son âme habite,

On voit le sourcil s´ébaucher,
Arc onduleux d´or ou d´ébène
Que craint d´effacer une haleine,
Ou le pinceau de retoucher !

Là jaillissent deux étincelles
Que voile et couvre à chaque instant,
Comme un oiseau qui bat des ailes,
La paupière au cil palpitant!
Sur la narine transparente
Les veines où le sang serpente
S´entrelacent comme à dessein,
Et de sa lèvre qui respire
Se répand avec le sourire
Le souffle embaumé de son sein !

Comme un mélodieux génie
De sons épars fait des concerts,

Une sympathique harmonie
Accorde entre eux ces traits divers ;
De cet accord, charme des charmes,
Dans le sourire ou dans les larmes
Naissent la grâce et la beauté ;
La beauté, mystère suprême
Qui ne se révèle lui-même
Que par désir et volupté !

Sur ses traits dont le doux ovale
Borne l´ensemble gracieux,
Les couleurs que la nue étale
Se fondent pour charmer les yeux ;
A la pourpre qui teint sa joue,
On dirait que l´aube s´y joue,
Ou qu´elle a fixé pour toujours,
Au moment qui la voit éclore,
Un rayon glissant de l´aurore

Sur un marbre aux divins contours !

Sa chevelure qui s´épanche
Au gré du vent prend son essor,
Glisse en ondes jusqu´à sa hanche,
Et là s´effile en franges d´or ;
Autour du cou blanc qu´elle embrasse,
Comme un collier elle s´enlace,
Descend, serpente, et vient rouler
Sur un sein où s´enflent à peine
Deux sources d´où la vie humaine
En ruisseaux d´amour doit couler!

Noble et légère, elle folâtre,
Et l´herbe que foulent ses pas
Sous le poids de son pied d´albâtre
Se courbe et ne se brise pas !
Sa taille en marchant se balance

Comme la nacelle, qui danse
Lorsque la voile s´arrondit
Sous son mât que berce l´aurore,
Balance son flanc vide encore
Sur la vague qui rebondit !

Son âme n´est rien que tendresse,
Son corps qu´harmonieux contour,
Tout son être que l´oeil caresse
N´est qu´un pressentiment d´amour !
Elle plaint tout ce qui soupire,
Elle aime l´air qu´elle respire,
Rêve ou pleure, ou chante à l´écart,
Et, sans savoir ce qu´il implore
D´une volupté qu´elle ignore
Elle rougit sous un regard !

Mais déjà sa beauté plus mûre

Fleurit à son quinzième été ;
A ses yeux toute la nature
N´est qu´innocence et volupté !
Aux feux des étoiles brillantes
Au doux bruit des eaux ruisselantes,
Sa pensée erre avec amour ;
Et toutes les fleurs des prairies
Viennent entre ses doigts flétries
Sur son coeur sécher tour à tour !

L´oiseau, pour tout autre sauvage,
Sous ses fenêtres vient nicher,
Ou, charmé de son esclavage,
Sur ses épaules se percher ;
Elle nourrit les tourterelles,
Sur le blanc satin de leurs ailes
Promène ses doigts caressants,
Ou, dans un amoureux caprice,

Elle aime que leur cou frémisse
Sous ses baisers retentissants !

Elle paraît, et tout soupire,
Tout se trouble sans son regard ;
Sa beauté répand un délire
Qui donne une ivresse au vieillard !
Et comme on voit l´humble poussière
Tourbillonner à la lumière
Qui la fascine à son insu !
Partout où ce beau front rayonne,
Un souffle d´amour environne
Celle par qui l´homme est conçu !

Un homme ! un fils, un roi de la nature entière !
Insecte né de boue et qui vit de lumière !
Qui n´occupe qu´un point, qui n´a que deux instants,

Mais qui de l´Infini par la pensée est maître,
Et reculant sans fin les bornes de son être,
S´étend dans tout l´espace et vit dans tous les temps !

Il naît, et d´un coup d´oeil il s´empare du monde,
Chacun de ses besoins soumet un élément,
Pour lui germe l´épi, pour lui s´épanche l´onde,
Et le feu, fils du jour, descend du firmament !

L´instinct de sa faiblesse est sa toute-puissance;
Pour lui l´insecte même est un objet d´effroi,
Mais le sceptre du globe est à l´intelligence ;
L´homme s´unit à l´homme, et la terre a son roi !

Il regarde, et le jour se peint dans sa paupière ;
Il pense, et l´univers flans son âme apparaît !
Il parle, et son accent, comme une autre lumière,
Va dans l´âme d´autrui se peindre trait pour trait !

Il se donne des sens qu´oublia la nature,
Jette un frein sur la vague au vent capricieux.
Lance la mort au but que son calcul mesure,
Sonde avec un cristal les abîmes des cieux !

Il écrit, et les vents emportent sa pensée
Qui va dans tous les cieux vivre et s´entretenir !
Et son âme invisible en traits vivants tracée
Ecoute le passé qui parle à l´avenir !

Il fonde les cités, familles immortelles ;
Et pour les soutenir il élève les lois,
Qui, de ces monuments colonnes éternelles,
Du temple social se divisent le poids !

Après avoir conquis la nature, il soupire ;
Pour un plus noble prix sa vie a combattu ;
Et son coeur vide encor, dédaignant son empire,
Pour s´égaler aux dieux inventa la vertu !

Il offre en souriant sa vie en sacrifice,
Il se confie au Dieu que son oeil ne voit pas ;
Coupable, a le remords qui venge la justice,
Vertueux, une voix qui l´applaudit tout bas !

Plus grand que son destin, plus grand que la nature,
Ses besoins satisfaits ne lui suffisent pas,
Son âme a des destins qu´aucun oeil ne mesure,
Et des regards portant plus loin que le trépas !

Il lui faut l´espérance, et l´empire et la gloire,
L´avenir à son nom, à sa foi des autels,
Des dieux à supplier, des vérités à croire,
Des cieux et des enfers, et des jours immortels !

Mais le temps tout à coup manque à sa vie usée,
L´horizon raccourci s´abaisse devant lui,
Il sent tarir ses jours comme une onde épuisée,
Et son dernier soleil a lui !

Regardez-le mourir ! Assis sur le rivage
Que vient battre la vague où sa nef doit partir,
Le pilote qui sait le but de son voyage
D´un coeur plus rassuré n´attend pas le zéphyr !

On dirait que son oeil, qu´éclaire l´espérance,
Voit l´immortalité luire sur l´autre bord,
Au-delà du tombeau sa vertu le devance,
Et, certain du réveil, le jour baisse, il s´endort !

Et les astres n´ont plus d´assez pure lumière,
Et l´Infini n´a plus d´assez vaste séjour,
Et les siècles divins d´assez longue carrière
Pour l´âme de celui qui n´était que poussière
Et qui n´avait qu´un jour !

Voilà cet instinct qui l´annonce
Plus haut que l´aurore et la nuit.
Voilà l´éternelle réponse
Au doute qui se reproduit !
Du grand livre de la nature,
Si la lettre, à vos yeux obscure,
Ne le trahit pas en tout lieu,
Ah ! l´homme est le livre suprême :
Dans les fibres de son coeur même
Lisez, mortels : Il est un Dieu !