💃🎤 Paroles de chanson Française et Internationnales 🎤💃
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A B C D E F G H I J K L M N O P Q R S T U V W X Y Z 0 1 2 3 4 5 6 7 8 9 Ajouter aux Favoris Titre : Au manoir de Keranglaz
Elle est couchée en son lit clos ; Elle dort, elle dort, Tryphine ! Aussi blonds que la paille fine, Ses cheveux coulent à longs flots Sur la nacre de sa poitrine. Et la cuisine vaste est pleine de sanglots ! *** On a pour la veillée invité les fileuses ; Par les sentiers prochains on les entend venir. La vieille Anna Congard est parmi les veilleuses . Lévénez à la mort ne cesse de hennir. Leur linge sur l´épaule, entrent les lavandières. Ces prêtresses des eaux, des sources nourricières, Sur le front de la morte étendant leurs battoirs, L´aspergent en chantant du pleur des étangs noirs. Et sont près du foyer les vieilles pèlerines . Keranglaz, de tout temps, leur fut hospitalier. Leurs écuelles, toujours, à côté des terrines, Eurent place dans l´âtre ainsi qu´au vaisselier. Comme elles cheminaient ce soir par la contrée, Ayant flairé la mort en passant près du seuil, Toutes de Keranglaz ont envahi l´entrée, Leur coiffe rabattue en signe de grand deuil. A la coutume antique obstinément fidèles, Elles ont prosterné sur l´âtre leur vieux corps, Puis, d´un ton primitif et sauvage, une d´elles En l´honneur de la morte a dit le chant des morts. » Ne pleure pas, ô toi qu’on pleure ; » La vie est si douce où tu vas ; » Elle est si mauvaise ici-bas, » Que la plus courte est la meilleure !… » Toi qu’on pleure, ne pleure pas ! » Morte en tes jeunes destinées, » Tu n’auras pas vu les autans » Faire bruire tes années » Ainsi que des feuilles fanées » Dans les sentiers de ton printemps ! » Fille, tu n’as pas été femme ! » Ton coeur est pur comme le feu. » Tu n’as qu’à voler jusqu’à Dieu » Sur l’aile blanche de ton âme. » Péchés d’enfant pèsent si peu ! *** Tryphine a dans ses doigts un chapelet d’ébène, Sous l’ombre de ses cils qui semble s’allonger, Son regard clos à peine Le long des rideaux blancs suit le songe léger Que, vivants, ses yeux clairs se plurent à songer. Et le vieux Keranglaz, n’ayant plus d’héritière, Sentant crouler sur lui sa maison tout entière, Serre sa tête dure entre ses poings velus Et pleure sur les siens qui ne verdiront plus. *** La vieille Anna Congard, parmi les vieilles femmes, S’est mise à chevroter la » prière des âmes « ; Et les répons plaintifs fredonnés vaguement Font à la douce morte un plaintif bercement. Et, dans le ciel, des voix s’éveillent par centaines ; Et l’on entend frémir des musiques lointaines ; Et tout l’espace vibre, et c’est signe, dit-on, Qu’on ouvre à deux battants le paradis breton… Le firmament en fleur est comme un pommier rose, Et l’aube s’est levée, et la veillée est close…