Habillez-moi de tous vos mots d´amour Ceux qui sont perdus, ceux dont on a honte Dont on a laissé s´effacer le compte Réchauffez-moi, j´ai perdu mes velours J´ai perdu ma soie, j´ai perdu mes ailes
Et la poudre d´or qui brillait dessus Je l´ai dispersée avec tant de zèle Qu´elle s´est fanée, je ne l´ai pas su
Habillez-moi de tous vos pauvres mots Les mots des enfants qui sont si fragiles Qu´on les garde en soi comme un évangile Qu´on ne les redit que pianissimo J´ai perdu mon chant, j´ai perdu mes trilles Les notes du bas, les notes du haut Celles qui poussaient parmi les jonquilles Celles qui planaient avec les oiseaux
Habillez-moi de vos mots les plus fous De vos mots légers, ceux qui s´éparpillent Qui vont se nicher dans les yeux qui brillent Et qui font plaisir avec rien du tout J´ai perdu beaucoup, j´ai perdu le rêve
Et le rire aussi qui m´allait si bien Des branches cassées, s´écoule la sève Et si l´arbre penche, qui le retient ?
Habillez-moi de vos mots fatigués Les mots du passé, ceux du crépuscule Qu´en les redisant, le cœur vous bouscule J´ai tant de tendresse à vous divulguer J´ai perdu mon pas, j´ai perdu ma danse L´envie de courir et le pied léger Ce qu´il me restait de l´esprit d´enfance A tourné le dos, s´est découragé
Habillez-moi de mots qui sont à vous Des mots inventés, des mots éphémères Qui n´ont pas traîné le long des grammaires Qui parlent encore la langue des fous Quand j´aurai perdu tout, jusqu´à ma plume
Et le goût de l´eau, la saveur du jour Ne me cherchez pas et sans amertume Je dormirai dans tous vos mots d´amour