On dit que Lazare et Cécile Se sont enfuis cette nuit Et que la lune docile Jusqu´au matin n´a pas lui On dit qu´un foulard de brume
Fit pour elle un voile blanc Fit à Lazare un costume Tissé de nacre et d´argent
On le savait au village Que Cécile allait souvent Rêvasser dans les herbages Et danser avec le vent On riait de ce Lazare Sans amie sans fiancée Qui rôdait près de la mare Et n´allait jamais danser
On dit que Lazare et Cécile Ont un soir changé d´avis C´était pourtant pas facile De se cacher près d´ici Ils ont joint leur solitude
Ils ont partagé le vent Prenant la douce habitude De s´aimer secrètement
Au bout de quelques semaines Il parut aux indiscrets Que dans sa jupe de laine Cécile s´alourdissait Lors il fallut les entendre Tous crier au déshonneur Mais Cécile qui est tendre A préféré le bonheur
On dit que Lazare et Cécile Se sont enfuis cette nuit Il y a bien des imbéciles Pour en sourire aujourd´hui Pourtant jusqu´au bout des saules
Ils se sont tenus la main Puis épaule contre épaule Ils ont suivi leur chemin
On aurait voulu peut-être Voir Cécile dans l´étang Et sur la branche d´un hêtre Trouver Lazare pendant Sans gêne on aurait pu suivre Leur cortège en soupirant Mais ceux que l´amour délivre Préfèrent s´aimer vivants
On dit que Lazare et Cécile Se sont mariés cette nuit Dans la lumière fragile Des heures d´après minuit On dit qu´au creux de la mare
La lune en deux se brisa Formant deux anneaux bizarres Qu´ils se glissèrent au doigt
Quand ils ont couru ensemble Le vent leur fit un manteau Moi qui ne dormais pas j´en tremble De les avoir vus si beaux Toi, Cécile, toi, Lazare Apprenez à votre enfant Que jamais on ne sépare Ceux qui s´aiment simplement.