C´est un lion qui tombe en amour Pour une demoiselle Il lui tient tant de beaux discours Qu´elle n´est point cruelle Elle lui trouve poil luisant
Belle stature, œil conquérant Et sourire farouche Elle aime sa crinière au vent Et jusqu´à son rugissement Qui, droit au cœur, la touche
Elle l´invite à la maison Plaignez, plaignez le pauvre lion !
Le père en voyant arriver La belle bête fauve Commence à se barricader Et sa femme se sauve Le lion, se mettant à genoux, Dit "Monsieur, m´accorderez-vous Le main de votre fille ? Je suis d´un naturel très doux Ne suis ni violent ni jaloux
Et la trouve gentille
Sans tarder nous nous marierons" Plaignez, plaignez le pauvre lion !
"Entrez, entrez Messire, entrez Ma fille vous espère Mais pour l´heure vous entendrez Les conseils d´un beau-père Les griffes que vous avez là Seront autant de coutelas Dessus sa chair si tendre Quant à vos baisers, halte-là ! Car les canines que voilà Vont bien trop la surprendre
Entrez, nous vous arrangerons" Plaignez, plaignez le pauvre lion !
Et par amour le lion souffrit Qu´on lui rognât les ongles Il laissa, sans le moindre cri, Limer ses dents si longues La belle lui passa au cou Une manière de licou Comme on met aux caniches Il ne résista pas beaucoup Et pour ne pas prendre de coups Il entra dans la niche
On lui fit garder la maison Plaignez, plaignez le pauvre lion !
Avant de voir, pauvres amants, Pour l´amour d´une belle Arracher vos griffes, vos dents
Vider votre cervelle Avant que votre triste sort Vous fasse désirer la mort Comme une délivrance Brisez vos chaînes sans remords Amour quand tu nous tiens si fort Adieu toute prudence
Ne souffrez pas cette prison Plaignez, plaignez le pauvre lion ! Ne souffrez pas cette prison Plaignez, plaignez le pauvre lion !