Quand j´ai perdu mon enfance, j´étais pleine de piquants. A quinze ans faut que l´on danse: ils ne prenaient pas de gants. Ceux qui m´ont vue triste, triste
esquisser mes premiers pas, m´aventurer sur la piste, ceux-là ne m´aidèrent pas. J´aurais, pour qu´on m´apprivoise, pour qu´on me tende la main, cueilli toutes les framboises dans les tout petits chemins, mais on avait, je supposes bien d´autres chats à fouetter, à cueillir bien d´autres roses que mon églantier.
J´étais pas la plus moche ni la moins futée, mais j´avais la caboche pas bien rabotée. J´étais pas la moins tendre, mais j´avais si peur qu´on ne veuille pas m´attendre à l´autre coin d´un cœur.
Puis s´éparpillent les danses comme s´en vont les années. A grand´ peine je commence à ne plus désespérer. Si quelquefois je m´attriste, j´ai appris à le cacher. Va, tant que le cœur résiste, on peut bien le déguiser. Je viens pour qu´on m´apprivoise, pour qu´on me tende la main. J´ai plus l´âge des framboises pour ce qui est des chemins. J´y ai couru, je suppose, assez pour avoir compris que plus vite meurt la rose que le pissenlit.
Je suis pas la plus moche ni la moins futée, et puis j´ai la caboche un peu mieux rabotée. Je suis pas la moins tendre, mais j´ ai toujours peur Qu´ on ne veuille pas m´attendre à l´autre coin d´un cœur. Je viens pour qu´on m´apprivoise, pour qu´on me tende la main. Je viens pour qu´on m´apprivoise, pour qu´on me tende la main...