Un mari pêcheur Voilà pour la femme Le plus grand malheur Le plus sombre drame À quatre heures, debout
Elle s´arrache du lit La femme après tout Doit suivre son mari Elle prend le panier Et le sac au dos L´attirail complet Dans les vingt kilos ! Lui qui passe devant Et va sans effort Tout en claironnant "Ah ! Ça, c´est du sport !"
La femme du pêcheur Elle est faite pour souffrir La femme du pêcheur C´est une pauv´ femme martyre
Il est installé
L´œil sur le bouchon Si elle ose bouger Il lâche un juron Si elle dit "Ça va, chéri ?" Très délicatement Il lui crie "Tais-toi, parle pas tout l´ temps !" Oh, y a pas à dire Quand on n´est pas d´ bois Ça fait bien plaisir Qu´on vous traite comme ça Elle s´ met à rêver Que ce gros balourd Sale et pas rasé C´est sa fleur d´amour
La femme du pêcheur Elle est faite pour souffrir
La femme du pêcheur C´est une pauv´ femme martyre
Il connaît l´extase Il se sent champion Les pieds dans la vase Il tient un gardon À son air de gloire À son air de fête On sent la victoire De l´homme sur la bête ! Il décroche l´hameçon Elle pense, écœurée, Que l´homme n´est au fond Qu´une brute sans pitié Pauv´ petit poisson Ce soir, pour dîner Que ça m´ plaise ou non
Va falloir t´ manger !
La femme du pêcheur Elle est faite pour souffrir La femme du pêcheur C´est une pauv´ femme martyre
Tout frigorifié Lorsque vient la nuit "Ah, on va y aller !" Déclare le mari Moment attendu Aussitôt rentré Sitôt étendu Y s´ met à ronfler Et pendant ce temps Pleine d´abnégation La femme, bravement,
Vide le gardon Car pour les copains Ce p´tit gardon-là Sera dès demain Un brochet comme ça !
La femme du pêcheur C´est une pauv´ femme martyre !