Titre : La Vie des Morts – La Nature – 08 – La neige
On dirait que la Terre a bu le sang des lis Et d’un deuil éclatant voile cette hécatombe, Car déjà la blancheur des marbres clôt la tombe Où dorment pour longtemps ces doux ensevelis.
Je t’adore, ô pâleur des vierges trépassées Dans l’éblouissement des rêves amoureux, Emportant dans l’azur les essors douloureux De leur âme pareille aux colombes blessées !
Quel vent a flagellé l’aile que tu parais, Doux et flottant duvet tombé du vol des anges, Et secoué dans l’air tes floraisons étranges Qui font comme un printemps à l’hibernal cyprès !
Les cygnes se sont-ils heurtés contre la nue, Cherchant aux cieux l’azur de leurs grands lacs fermés ? - Ou Psyché, renouant ses voiles parfumés, De ses jeunes candeurs s’est-elle souvenue ?
On dirait que la Terre a pitié de nos morts, Et, Vierge devenue au toucher de la neige, Suspend des floraisons le travail sacrilège Dans ses flancs qu’au repos invite le remords.
O Neige ! tu m’étreins le front sous le mystère De ta froide splendeur et, comme épouvanté, Je pense que, des cieux déchus de leur clarté, Le lait d’une déesse a coulé sur la terre.