La froidure paresseuse De l´yver a fait son temps; Voicy la saison joyeuse Du délicieux printemps
La terre est d´herbes ornée L´herbe de fleuretes l´est; La feuillure retournée Fait ombre dans la forest
De grand matin, la pucelle Va devancer la chaleur Pour de la rose nouvelle Cueillir l´odorante fleur Pour avoir meilleure grace Soit qu´elle en pare son sein Soit que présent elle en fasse A son amy, de sa main:
Qui, de sa main l´ayant uë Pour souvenance d´amour Ne la perdra point de vuë La baisant cent fois le jour
Mais oyez dans le bocage Le flageolet du berger Qui agace le ramage Du rossignol bocager
Voyez l´onde clere et pure Se cresper dans les ruisseaux; Dedans, voyez la verdure De ces voisins arbrisseaux
La mer est calme et bonasse; Le ciel est serein et cler La nef jusqu´aux Indes passe; Un bon vent la fait voler
Les menageres avetes Font çà un doux fruit
Voletant par les fleuretes Pour cueillir ce qui leur duit En leur ruche elles amassent Des meilleures fleurs la fleur C´est à fin qu´elles en fassent Du miel la douce liqueur
Tout resonne des voix nettes De toutes races d´oyseaux Par les chams, des alouetes Des cygnes, dessus les eaux
Aux maisons, les arondelles Les rossignols, dans les boys En gayes chansons nouvelles Exercent leurs belles voix
Doncques, la douleur et l´aise
De l´amour je chanteray Comme sa flame ou mauvaise Ou bonne, je sentiray
Et si le chanter m´agrée N´est-ce pas avec raison Puis qu´ainsi tout se recrée Avec la gaye saison?