Écoutez l’histoire éphémère
D’un enfant qui mangea sa mère
L’avaleur déjà tout petit
Avait un très gros appétit
Après trois ou quatre nourrices

Il goba son institutrice
L’avaleur était généreux
Le ventre plus grand que les yeux
Notre morfal insatiable
Ne songeait qu’à se mettre à table
Tout lui semblait appétissant
Le phénomène allait croissant
D’ailleurs il avala la lune
C’est au cirque qu’il fit fortune
Dès lors grâce à son numéro
L’avaleur devint un héros
Bâfrant sans demander son reste
Les objets les plus indigestes
Tout était bon pour le goulu
Pour y jeter son dévolu
Un académicien son œuvre
La pilule et quelques couleuvres
Un avocat et son barreau

La guillotine et son bourreau

Sans même présager d´un quelconque danger
L’avaleur a mangé de la vache enragée

Un parapluie une baleine
La cruche et Marie-Madeleine
Henri III et son bilboquet
Et le juge avec son parquet
Un œuf d´autruche un truc en plumes
Un requin-marteau une enclume
Une grenouille avec son bœuf
Un bateau-mouche et le Pont Neuf
Quasimodo et Notre dame
Le soldat inconnu sa femme
La pervenche et le papillon
Et le sabre et le goupillon
Il n’est pas né le ministère

Qui saura gérer l’inventaire
De tout ce qu’il a pu grailler
Prévert peut bien se rhabiller
Le goinfre s’éprit d’une ogresse
Remplie d’enfants et d’allégresse
Peut-on vraiment lui reprocher
S’il n’en a fait qu’une bouchée
Le boulimique c´est classique
Tomba sur une anorexique
Voulant l’embrasser sur le bec
Il l’avala d’un trait cul sec

Et sans désemparer il bouffait du curé
Sans jamais saturer sans la moindre diarrhée

Pas de répit pour l´œsophage
De l´omnivore polyphage
Même la lame de la faux

Ne pouvait le prendre en défaut
Mais un jour survint l’impensable
L’anicroche le grain de sable
Le coup de tocsin du destin
La toxine dans le festin
Convoqué à la préfecture
Pour justifier de sa nature
Par une sorte de greffier
Il s’y rendit sans se méfier
Et sans aucune réticence
Avala son bull’tin d´naissance
L’exercice lui fut fatal
Ce fut l’étouffement brutal
C´est pour la cause indigestive
Des lourdeurs administratives
Que notre ami s´en est allé
La chose est dure à avaler
C´est pour la cause indigestive

Des lourdeurs administratives
Que notre ami s´en est allé
La chose est dure à avaler

À son dernier repas trop vite condamné
L’avaleur n’atteint pas un grand nombre d’années