Elle est folle, m´avait-on dit Et dans les gares, chaque nuit Durant des heures, se promène Intriguée soudain, j´ai voulu Savoir le véritable but
Que poursuivait cette âme en peine Et la vieille m´a répondu Sans nulle gêne
J´attends le train qui doit un jour Me conduire au pays du rêve Sur une vaste et blanche grève Où le printemps dure toujours Vous me direz, je sais qu´il tarde Que bientôt la pluie et le vent Auront fini d´user mes hardes Ça ne fait rien, j´attends, j´attends
Car lui seul me ramènera Vers le soleil, vers le beau gars Qui m´a jadis abandonnée Je lui dirai tout simplement J´ai souffert vois-tu tant et tant
Que ta faute en est pardonnée Je lui dirai, oui, mais avant Jamais lassée
J´attends le train qui doit un jour Me conduire au pays du rêve Sur une vaste et blanche grève Où le printemps dure toujours Fini les combats, les épreuves La pluie infernale et le vent J´aurai de belles robes neuves Aussi, voyez, j´attends, j´attends
La nuit triste allait s´achever Lorsque j´ai vu sur le pavé S´abattre la pauvre démente La mort, à ses grands yeux déjà Donnait un irréel éclat
Une grâce encore plus touchante Alors j´ai murmuré là-bas "Soyez contente
Voici le train qui doit, un jour Vous conduire au pays du rêve Sur une vaste et blanche grève Où le printemps dure toujours" Mais, avec un dernier sourire Je n´obtins qu´un navrant regard Mieux que tous les mots sachant dire "Trop tard, hélas, il est trop tard"