Je m´en veux de t´avoir fait de la peine Je m´en veux d´avoir brisé ton cœur Tu m´aimais, ô ma Germaine Mais dans ma rage inhumaine Je t´ai plongée brutalement dans le malheur
Pardonne-moi si j´ai pu friper ton âme Je m´en veux de mon iniquité Non, vraiment, je suis infâme Je m´insulte et je me blâme Je m´en veux pour tout l´éternité C´est fou c´ que j´ m´en veux
Lorsque je vis dans l´autobus ton corps de femme C´est comme un choc que tout à coup je ressentis Pendant cinq ans et dix-huit jours, nous nous aimâmes Et puis voilà qu´un beau matin je suis parti
Pourquoi, pourquoi ai-je quitté le pied-à-terre Dessous les toits où nous vivions si gentiment ? Pourquoi, pourquoi ? Le cœur de l´homme est un mystère
C´est un bijou dont on ignore le maniement
Je m´en veux de t´avoir fait de la peine Je m´en veux d´avoir brisé ton cœur J´ suis parti, ô ma Germaine Sans un mot, sans dire amen Sans payer ni le loyer ni l´ blanchisseur
Je m´en veux, avec un V majuscule Quand je pense que je t´ai quittée En emportant sans scrupules Ton piano et ta pendule Je m´en veux pour tout l´éternité J´ m´en veux, tu sais !
Je sais très bien le chagrin que t´as dû connaître Quand tu compris que j´étais parti sans retour
Des jours entiers, tu es restée à ta fenêtre Guettant sans fin, guettant quand même, guettant toujours
Combien de fois, contemplant ma photographie Celle où je suis en uniforme de hussard Tu essayas brusquement de finir ta vie En avalant de l´arsenic sur un bout d´ lard ?
Je m´en veux de t´avoir fait de la peine Je m´en veux d´avoir brisé ton cœur Car vraiment, t´as pas eu d´ veine T´as voulu t´ foutre dans la Seine Mais seulement, t´es tombée sur un remorqueur
Depuis lors, t´as épousé l´ capitaine Un barbu avec des yeux rêveurs Là encore, t´as pas eu d´ veine
Car c´était un phénomène Qui n´aimait que les plombiers zingueurs Il t´a laissée sur le sable Et c´est moi le responsable J´ m´en veux d´avoir fait ton malheur !