Je regarde d’en haut passer et disparaître Joyeux bourgeois, marchands,
Ouvriers en habits de fête, au coeur plein d’aise ; Un livre est entr’ouvert, près de moi, sur ma chaise : Je lis ou fais semblant ; Et les jaunes rayons que le couchant ramène, Plus jaunes ce soir-là que pendant la semaine, Teignent mon rideau blanc.
J’aime à les voir percer vitres et jalousie ; Chaque oblique sillon trace à ma fantaisie Un flot d’atomes d’or ; Puis, m’arrivant dans l’âme à travers la prunelle, Ils redorent aussi mille pensers en elle,
Mais où la retrouver, quand elle s’est perdue, Cette humble foi du coeur, qu’un Ange a suspendue En palme à nos berceaux ; Qu’une mère a nourrie en nous d’un zèle immense ;
Dont chaque jour un prêtre arrosait la semence Aux bords des saints ruisseaux ?
Ce ne sont que chansons, clameurs, rixes d’ivrogne, Ou qu’amours en plein air, et baisers sans vergogne, Et publiques faveurs ; Je rentre : sur ma route on se presse, on se rue ; Toute la nuit j’entends se traîner dans ma rue Et hurler les buveurs.