Titre : Sous un souffle apaisé quand rit la mer sereine
Traduit de Moschus.
I
Sous un souffle apaisé quand rit la mer sereine,
Tout mon coeur s’enhardit, et pour l’humide plaine La terre est oubliée : ô mer, je viens à toi ! Mais qu’un grand vent s’élève et réveille l’effroi, Que l’écume du flot blanchisse et fasse rage, Tout mon amour alors se reprend au rivage ; Je ne veux que les bois, et l’ombre et les gazons : Le pin, par un grand vent, rend encor de doux sons. Pêcheur, que je te plains, dans ta nef pour demeure, Chassant ta proie errante au péril de chaque heure ! À moi le bon sommeil sous un platane épais ! À moi les jours couchés au sein d’un antre frais,
Et la source au long bruit, qui, roulant sous la voûte, Charme et ne peut troubler le pasteur qui l’écoute !
II
Pan aimait Écho, sa voisine, Qui pour le Satyre brûlait, Et le Satyre aimait Nérine ; Leur flamme, à tous trois, se brouillait. Jeu bizarre, et pourtant le nôtre ! Ce qu’un amant inflige à l’autre, D’un autre il l’éprouve à son tour : Le talion est loi d’amour. Or voici ma leçon ; que le novice entende : Rends l’amour à qui t’aime, afin qu’on te le rende.
III
Quittant Pise et ses jeux, Alphée au flot d’argent Cherche à travers les mers Aréthuse en plongeant ; Et dans son sein il porte à la nymphe adorée L’olivier des vainqueurs et la poudre sacrée. Profond, pur, et chargé des amoureux cadeaux, Il fend le flot amer sans y mêler ses eaux ; Et le grand flot dormant ne sent rien, et l’ignore, Et l’a laissé passer. Ah ! c’est Amour encore, Le mauvais, le perfide et le rusé songeur, C’est lui dont l’art secret fit du fleuve un plongeur !