" Je serai ton inspiratrice " Disait elle au compositeur Ils se marièrent à Saint Sulpice Sous le regard du Créateur Dans un trois pièces ils installèrent
Le piano à queue, leurs deux cœurs Les doigts inspirés attaquèrent Quand retentit l´aspirateur
L´artiste crispa ses paupières Sur la perfection d´un accord L´aspirateur et la poussière Se combattaient au corps à corps " Arrête un peu, je t´en prie, Claire !" Ainsi se nommait l´âme sœur Qui répondit: " Je m´vois les pierres Il faut changer l´aspirateur - L´aspirateur ? - L´aspirateur
" Ce sont de vrais nids à poussière Que ces appartements vieillots Je veux que ta maison soit claire
Et brille autant que ton brio. " Le lendemain l´inspiratrice Et son nouvel inhalateur Laboure, pompe, suce, ratisse, Bat les tapis à coups d´moteur D´aspirateur, d´aspirateur
" Arrête Claire, aïe, aïe, aïe, aïe ! Prends un plumeau, prends un balai Comment veux tu que je travaille Béjart me commande un ballet ! Je n´en peux plus de ce vacarme J´aspire au calme inspirateur ! " Claire est en pleurs, Claire est en larmes... Dans le placard l´aspirateur L´aspirateur, l´aspirateur
Délicieux, le silence neige
Le musicien sur le clavier Fait ruisseler de doux arpèges En attendant son parolier. Tiens, le voici, la mine fière Son dernier titre sur le cœur : " Poussière, tout n´est que poussière... J´entends un blues avec des chœurs... Pourquoi pas des aspirateurs Aspirateurs ! conspirateurs ! ! "
Ulcéré repart le poète Avec son œuvre sur le foie " Permets au moins que j´époussette Demande Claire, rien qu´une fois Regarde, amour, c´est plein de cendres Je n´ai besoin que d´un quart d´heure... C´est entendu, je vais descendre." À peine est il dans l´ascenseur
Que vrombit le tuyau téteur, L´aspirateur, l´aspirateur
L´engin rugit, l´humeur gloutonne Broute les murs après le sol Sur le clavier il s´époumone Par ci, par là, il gobe un sol Enfin se tait sa grosse bouche. Revient l´artiste, scrutateur : " Mon piano, Claire, où sont les touches ? Mon ré, Fauré, mon do, Mahler ! Dans les tripes de l´aspirateur ? ! ! ! L´aspirateur, l´aspira..."
D´un infarctus, Alfred s´écroule (Ainsi se nommait ce génie) Grand Dieu, sous ses pieds se déroule La moquette du paradis
Un séraphin ou séraphine À en juger par ses rondeurs Le conduit par des voies divines Tout n´est qu´éclat, fraîcheur, splendeur... Ah ! nul besoin d´aspirateur ! Ah ! nul besoin d´aspirateur...
Devant un grand queue, on l´installe Cristal de joie, pur diapason L´air étincelle de pétales Partout prairies et frondaisons... Mais que voit il là bas ? c´est Claire Qui le rejoint en quelques bonds " Sans toi, si lourde était la terre Je n´ai pu te survivre, non ! Et maintenant que vas tu faire ? Demande Alfred d´un certain ton Claire regarde à l´horizon