Que le bonheur arrive lentement! Que le bonheur s´éloigne avec vitesse! Durant le cours de ma triste jeunesse, Si j´ai vécu, ce ne fut qu´un moment. Je suis puni de ce moment d´ivresse.
L´espoir qui trompe a toujours sa douceur, Et dans nos maux du moins il nous console; Mais loin de moi l´illusion s´envole, Et l´espérance est morte dans mon coeur. Ce coeur, hélas! que le chagrin dévore, Ce coeur malade et surchargé d´ennui, Dans le passé veut ressaisir encore De son bonheur la fugitive aurore, Et tous les biens qu´il n´a plus aujourd´hui; Mais du présent l´image trop fidèle Me suit toujours dans ces rêves trompeurs, Et sans pitié la vérité cruelle Vient m´avertir de répandre des pleurs. J´ai tout perdu; délire, jouissance, Transports brûlants, paisible volupté, Douces erreurs, consolante espérance, J´ai tout perdu : l´amour seul est resté.