Le chêne un jour dit à la tortue Que vous êtes belle, que vous courez bien ! Votre voix qui m´est inconnue Doit être aussi fraîche que l´air du matin La tortue, alors secrètement flattée,
Aspira très fort et se mit à chanter Et le lièvre dans le bois mouillé Pour l´entendre, cessa de brouter. Mais hélas la pauvre tortue Ayant sans relâche chanté tout l´été Se trouva toute dépourvue A la fin d´automne sans rien à croûter Elle alla trouver la cigale aux yeux verts Poétesse cotée dont elle aimait les vers Qui lui dit : "Non, j´ai ma locataire La fourmi qui est dans la misère."
Alors le corbeau, le loup et l´agneau Le coche et le chat et le souriceau L´huître et les plaideurs L´aigle et le chasseur Décidèrent d´agir en sa faveur.
Et chacun s´en fut, l´âme émue Faire à la tortue un présent discret Le renard offrit en partage un peu du fromage Qu´il avait volé Le grand chêne donna de ses glands par kilos Le roseau donna la moëlle de ses os Et le lièvre offrit à sa consœur Une terrine de pâté de chasseur La fourmi donna des myrtilles Et le rat des villes quelques ortolans La cigale enfin convaincue Donna à la tortue la clé de ses champs À sa cour, le lion donna un grand gala Tous heureux de vivre, on rit et l´on dansa Mais les hommes ne s´entendaient pas Le jour même la bombe éclata Du feu, du fer