Ayez pitié, ayez pitié de moi, A tout le moins, s´il vous plaît, mes amis ! En fosse gis, non pas sous houx ne mai, En cet exil ouquel je suis transmis Par Fortune, comme Dieu l´a permis.
Filles aimant jeunes gens et nouveaux, Danseurs, sauteurs, faisant les pieds de veaux, Vifs comme dards, aigus comme aiguillon, Gousiers tintant clair comme cascaveaux, Le laisserez là, le pauvre Villon ?
Chantres chantant à plaisance, sans loi, Galants riant, plaisants en faits et dits, Coureux allant francs de faux or, d´aloi, Gens d´esperit, un petit étourdis, Trop demourez, car il meurt entandis. Faiseurs de lais, de motets et rondeaux, Quand mort sera, vous lui ferez chaudeaux ! Où gît, il n´entre éclair ne tourbillon : De murs épais on lui a fait bandeaux. Le laisserez là, le pauvre Villon ?
Venez le voir en ce piteux arroi,
Nobles hommes, francs de quart et de dix, Qui ne tenez d´empereur ne de roi, Mais seulement de Dieu de paradis ; Jeûner lui faut dimanches et merdis, Dont les dents a plus longues que râteaux ; Après pain sec, non pas après gâteaux, En ses boyaux verse eau à gros bouillon ; Bas en terre, table n´a ne tréteaux. Le laisserez là, le pauvre Villon ?
Princes nommés, anciens, jouvenceaux, lmpétrez-moi grâces et royaux sceaux, Et me montez en quelque corbillon. Ainsi le font, l´un à l´autre, pourceaux, Car, où l´un brait, ils fuient à monceaux. Le laisserez là, le pauvre Villon ?