D´abord je n´ai vu rien que son regard Où se balançaient tous les océans Et dans la cohue la porte du bar Où il m´entraînait d´un air nonchalant
D´abord je n´ai vu rien que son chandail Où dansait en blanc le nom d´un bateau Et ses deux mains nues autour de ma taille Alors qu´il souriait en cherchant ses mots
Il baragouinait un drôle de français Je ne comprenais rien à ce qu´il voulait dire Mais pour deviner qu´il me désirait Y avait pas besoin de sortir de Saint-Cyr
D´abord je n´ai vu que la chambre étroite Avec son carreau donnant sur la cour Et l´ cœur éperdu contre sa peau moite Je m´ suis endormie, écrasée d´amour
D´abord je n´ai vu rien qu´un grand soleil Qui éclaboussait tout le ciel de joie Et soudain j´ai su que depuis la veille
Le bonheur avait des yeux de marin
D´abord je n´ai vu tout au bout du môle Qu´un triste cargo qui se balançait Et ma joue perdue contre son épaule Quand à chaque marche on s´embrassait
En me disant adieu, il avait les yeux Tout remplis d´embruns que la mer apportait Et moi, pauvre fille, comme une imbécile Qu´avait du chagrin, j´ai pensé qu´il pleurait
J´aurais bien dû voir que dans ces yeux-là Y avait pas de place pour le sentiment Mais quand j´ai vu ça, il était trop tard Tout mon bel amour s´était noyé dedans