L’âme des bons, fragile et douce étrangement, Ne peut pas croire à des trahisons incessantes Et qu’il faille toujours douter des voix absentes Et voir sur toute lèvre un silence qui ment.
Les bons, ceux qui n’ont pas la science de vivre, Pauvres âmes, en qui le moindre mot aimant Résonne en frissons d’or et tinte longuement Ainsi qu’un humble aumône au fond d’un tronc de cuivre
Les bons, ceux qu’un navire en allé, tout là-bas Au bout de l’océan, le soir, mélancolise ; Les bons qui, sans croyance, entrent dans une église Et rient aux amoureux qu’ils ne connaissent pas.
Les bons que n’ont frôlés ni l’orgueil, ni l’envie,
Qui conservent tout blanc leur manteau baptismal, Et, sans en être atteints, vont marchant dans le mal Et racontant au ciel leur ennui de la vie.
Les bons dont l’énergie, hésitante à vouloir, Cache son arme vaine aux yeux qui les regardent, Car c’est un poignard d’or damasquiné ? qu’ils gardent Dans un mélancolique étui de velours noir.
Les bons tout en douceur, les bons tout en faiblesse Un peu femmes, un peu enfants, ne voulant pas Diminuer leur rêve en d’infimes combats, Sachant que le silence est la seule noblesse.
Les bons dont la grande âme est comme un puits profond : Des passantes d’un jour, avant que l’eau ne gèle, Viennent l’une après l’autre au bord de la margelle Y voir leur beau visage étinceler au fond.
Mais des hommes cruels jalousant les lumières Du ciel qui s’y reflète avec tout son azur Arrivent lâchement lancer d’un geste sûr Dans ces coeurs ? des mots froids et durs comme des pierres !