đŸ’ƒđŸŽ€ Paroles de chanson Française et Internationnales đŸŽ€đŸ’ƒ

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Artiste : Georges Rodenbach
Titre : Un duo
Dans un chĂąteau sombre, au bord d’un Ă©tang,
Par un des derniers beaux jours de l’automne,
Nous étions groupés en cercle, écoutant
Monter lĂ  rumeur du soir monotone.

Sur l’étang moirĂ© plein de nĂ©nuphars,
Un jet d’eau vidait l’écrin de ses perles ;
Le soleil glissait ses rayons blafards
Dans les rameaux noirs oĂč sifflaient les merles.

C’était l’heure exquise oĂč lÂŽon veut aimer :
Le brouillard flottait comme une batiste ;
Les Ă©toiles d’or allaient s’allumer
Dans le vaste ciel couleur d’amĂ©thyste.

Nous Ă©tions au fond d’une vĂ©randah :
Dans des vases peints, sur les étagÚres
Des bouquets d’oeillets et de rĂ©sĂ©da
Soufflaient leurs parfums parmi les fougĂšres.

Les dames venaient prĂ©s de nous s’asseoir,
Frissonnant un peu sous leurs légers chùles,

Et nous regardions l’automne et le soir
S’unir tristement dans les lointains pñles.

Une jeune fille au profil plus fin
Que le blanc contour d’un camĂ©e antique,
Se dressant debout comme un séraphin
Qu’un artiste sculpte au seuil d’un portique,

Se mit à chanter dans l’ombre du parc :
Sa voix tour à tour était grave et tendre,
Comme un bon archer fait avec son arc
Qu’il doit tour Ă  tour bander ou dĂ©tendre.

Elle murmura dans l’air palpitant
Les tendres couplets de la sérénade
Que rĂȘva Gounod, comme on les entend
Au pied des balcons, la nuit, Ă  Grenade.

Nous fermions les yeux pour mieux écouter
Cette voix moelleuse et mélancolique,
Pareille à la voix qu’on entend flotter
Dans le choeur ombreux d’une basilique.

Quand soudain le chant d’un oiseau s’unit
Au vague refrain de la jeune femme :
On eĂ»t dit vraiment qu’il pleurait son nid
Et que sous son aile il avait une Ăąme !

Il était caché dans les arbres verts ;
Et pour endormir son amante ailée,
Il improvisait peut-ĂȘtre des vers
Qu’il lui modulait de sa voix perlĂ©e.

La femme et l’oiseau, chantant à la fois,
Firent un moment comme un duo tendre ;
Mais lasse de voir dominer sa voix,

La femme se tut, voulant mieux entendre.