Tiens, v´là mon voisin. Il me fait la gueule, Etienne J´l´aime bien, mais lui, j´crois pas qu´y m´piffe Pas plus tard qu´hier, j´avoue qu´il m´a fait d´la peine
Il m´a traitÊ d´improductif-fe Parce que quand il sarcle, quand il sème, quand il sue Je fais la sieste avec Lucienne Et qu´au bout du compte, il s´aperçoit que mes laitues Deviennent deux fois plus grosses que les siennes Et il est là , toujours là , et pis moi Par les p´tits trous de mon chapeau de soleil Je le vois turbiner sans cesse C´est comme un dÊfi qu´il ferait à mon sommeil Comme une insulte à ma paresse
Faut dire que Lucienne, il voudrait bien sâlâenvoyer Il manquerait plus qu´il me la chipe Ce s´rait pas joli, vu qu´il est dĂŠjĂ mariĂŠ Reuz´ment qu´j´suis lĂ pour sauver ses principes
Mais pour conter fleurette, faut du temps, et ça l´Ênerve Lui, qui de l´aurore au crÊpuscule Travaille à Lorient, oÚ il met des sardines en conserve Et même les jours de grosse canicule Tandis qu´moi, tandis qu´moi, tandis qu´moi Par les p´tits trous de mon chapeau de soleil Quand j´vois mes dahlias tomber d´faiblesse Ben, j´prends mon arrosoir, j´y mets au frais une bouteille Et j´arrose mes fleurs ... et ma paresse
Il me dit, comme ça, quâ jâ suis un mauvais citoyen Que j´mets rien dans la caisse communale Lui qui paye des impĂ´ts, y prĂŠtend qu´il lui appartient
Au moins six mèt´ vingt de la route vicinale Sa route vicinale, eh ben, y peut la garder C´est Ă travers champs que j´me traĂŽne Ăa sent meilleur, et ... et pis ce qui doit l´embĂŞter J´arrive toujours avant lui, chez Lucienne Et puis lĂ , et puis lĂ , et puis lĂ Par les p´tits trous de mon chapeau de soleil Je la vois dĂŠnatter ses tresses Accrocher sa robe Ă un bourgeon de la treille Et s´Êtendre auprès de ma paresse
Ah, bÊnies soient les fleurs et mon chapeau de soleil Le vin, Lucienne et ses caresses BÊni soit le ciel qui a fait tant de merveilles Et qui m´a douÊ de paresse