Comme tous les matins, tu es passée devant ce miroir, Ajusté ce voile sur tes cheveux, qui devra tenir jusqu´à ce soir Tu m´as dit au revoir d´un regard, avant de quitter la maison
Le bus t´emmène à la fac, où tu te construis un horizon.
Je suis resté immobile, j´ai pensé très fort à toi Réalisant la joie immense de te voir vivre sous mon toit C´est vrai, je ne te l´ai jamais dit -ni trop fort, ni tout bas Mais tu sais ma fille chez nous, il y a des choses qu´on ne dit pas.
Je t´ai élevée de mon mieux, et j´ai toujours fait attention À perpétuer les règles, à respecter la tradition Comme l´ont faits mes parents (crois moi sans riposter)
Comme le font tous ces hommes que je croise à la mosquée.
Je t´ai élevée de mon mieux comme le font tous les nôtres Mais étais-ce pour ton bien ? Ou pour faire comme les autres ? Tous ces doutes qui apparaissent et cette question affreuse : C´est moi qui t´ai élevée, mais es tu seulement « heureuse » ?
Je sais que je suis sévère, et nombreux sont les interdits : Tu rentres tout de suite après l´école et ne sort jamais le samedi Mais plus ça va et moins j´arrive à effacer cette pensée :
« Tu songes à quoi dans ta chambre, quand tes amis vont danser ? »
Tout le monde est fier de toi, tu as toujours été une bonne élève Mais a-t-on vu assez souvent un vrai sourire sur tes lèvres ? Tout ça je me le demande, mais jamais en face de toi Tu sais ma fille chez nous, il y a des choses qu´on ne dit pas
Et si on décidait que tous les bien-pensants se taisent ? Si pour un temps on oubliait ces convenances qui nous pèsent ? Si pour une fois tu avais le droit de faire ce que tu veux,
Si pour une fois tu allais danser en lâchant tes cheveux
J´veux qu´tu cries, et que tu chantes à la face du monde ! Je veux qu´tu laisses s´épanouir tous ces plaisirs qui t´inondent J´veux qu´tu sortes, j´veux qu´tu ries, j´veux qu´tu parles l´amour J´veux qu´tu aies le droit d´avoir 20 ans, Au moins pour quelques jours
Il m´a fallu du courage pour te livrer mes sentiments, Mais si j´écrits cette lettre, c´est pour que tu saches, simplement, Que je t´aime comme un fou, même si tu ne le vois pas,
Tu sais ma fille chez nous, il y a des choses qu´on ne dit pas.