Du paysan quittant sa t erre Et le calme de sa chaumière Croyant trouver plus fort salaire Que fais-tu, Paris, que fais-tu ? Du matin au soir dans l’usine
Devant une lourde machine Ah ! tu lui fais courber l’échine Paris ! Et lorsqu’enfin perdant courage Il voudrait revoir son village Tu le tiens dans ton engrenage. Voilà ce que tu fais Paris !
De la fillette rougissante, Frêle créature innocente, Qui vient chez toi comme servante Que fais-tu, Paris, que fais-tu ? Tu lui dis : « Ta maîtresse est belle Pourquoi ne fais-tu pas comme elle ? » Tu lui donnes bijoux, dentelles Paris ! Elle apprend les bonnes manières
Des catins, des aventurières, Elle se brûle à tes lumières Voilà ce que tu fais Paris !
Du jeune fêtard inutile Dispersant les billets de mille Dans l´orgie et l´amour facile Que fais-tu, Paris, que fais-tu ? Chaque jour nouvelle maîtresse Faux amour et fausse caresse Ah ! tu lui voles sa jeunesse Paris ! Et quand vanné, blasé, sceptique Dans le mariage il abdique, II récolte un fils rachitique. Voilà ce que tu fais Paris !
Et cependant, torrent qui gronde ! Tu conduiras toujours le monde Par ton esprit, par ta faconde, Tu le sais, Paris, tu le sais. Chaque jour à ta noble histoire Ajoute un nom, une victoire ; Hugo, Pasteur chantent ta gloire Paris ! Et s´élançant dans la fournaise Aux accents de la Marseillaise Tes fils ont fait Quatre-Vingt-Treize ! Voilà ce que tu fais Paris !
De tes savants, de tes artistes Inventeurs, peintres ou chimistes, Philosophes ou moralistes
Que fais-tu, Paris, que fais-tu ? Tu promets à tous la victoire Mais ils crèvent de faim sans gloire Et c´est toujours la même histoire Paris ! Mais après leur mort, dans la rue, Pour que l´ironi´ s´accentue, On leur élève une statue, Voilà ce que tu fais Paris !