RONDEAU. C’est ici l’endroit redouté des mères, L’endroit effroyable où les fils mineurs Font sauter l’argent gagné par leurs pères, Et rognent la dot promise à leurs sœurs.
A minuit sonnant commence la fête, Maint coupé s’arrête ; On en voit sortir De jolis messieurs, des femmes charmantes Qui viennent pimpantes Pour se divertir ! La fleur du panier, des brunes, des blondes, Et bien entendu, des rousses aussi… Les jolis messieurs sont de tous les mondes ; C’est un peu mêlé ce qu’on trouve ici ! Tout cela s’anime et se met en joie ; Frou frou de la soie, Le long des couloirs ; C’est l’adagio de la bacchanale, Dont la voix brutale Gronde tous les soirs ! Rires éclatants, fracas du champagne, On cartonne ici, l’on danse là-bas,
Et le piano qui grince accompagne Sur des airs connus d’étranges ébats ! Le bruit monte, monte et devient tempête, La jeunesse en fête Chante à plein gosier Est-ce du plaisir ou de la furie ? On parle, l’on crie Tant qu’on peut crier ! Quand on ne peut plus, il faut bien se taire, La gaieté s’en va petit à petit ; L’un dort tout debout, l’autre dort par terre, Et voilà comment la fête finit. Quand vient le matin, quand parait l’aurore, On en trouve encore, Mais plus de gaîté ! Les brillants viveurs sont mal à leur aise, Et dans le grand seize
On voudrait du thé ! Ils s’en vont enfin, la mine blafarde, Ivres de champagne et de faux amour, Et le balayeur s’arrête, regarde, Et leur crie ! « Ohé ; les heureux du jour ! »