Toi frangin de la nuit Aux yeux jamais ouverts Aux figures inventées Aux couleurs étrangères Laisse-moi te confier
Ces humeurs légendaires Je te prête mes yeux Et te chante la mer
C´est une musique douce comme une ondée de pluie La caresse furtive d´une chanson d´Italie C´est une main de femme qui t´appelle "Mon petit" Et t´invite au voyage pour de lointains pays C´est une odeur poivrée d´horizons infinis Riche de sortilèges qui t´embaument d´Asie
Sens-tu, frangin de nuit La vague messagère Qui porte jusqu´à nous Cette tiédeur amère ? Le rêve a mis ses voiles Pour percer le mystère Je te prête mes yeux
Je continue la mer
C´est une femme-enfant qui soudain fait envie À tant la désirer on y brûle sa vie C´est l´arôme anisé enivrant ton esprit Qui vient y raviver des fantasmes endormis Somptueuse et mouvante c´est une symphonie Où Beethoven au piano cherche ses harmonies
Écoute, frangin de nuit Cette tempête guerrière Que libèrent les flots Pour submerger la Terre C´est le vent qui charrie Des armées en colère Je te prête mes yeux Je te finis la mer
C´est une fleur cruelle aux parfums d´agonie S´ouvrant pour engloutir des bateaux alourdis C´est une fille rebelle bravant les interdits Attirante et farouche, toujours inassouvie C´est Wagner qui soulève des manteaux d´insomnie Pour des vaisseaux fantômes porteurs de tragédies
Voilà, frangin de nuit Garde sous tes paupières Ces images gravées Et quand tu désespères Souviens-toi de ce jour Où rencontre éphémère Je t´ai prêté mes yeux Pour que tu voies la mer