À qui rêves-tu si tu rêves, Front bombé que j’adore et voudrais entr’ouvrir, Entr’ouvrir d’un baiser pénétrant comme un glaive,
Pour voir si c’est à moi, - que tu fais tant souffrir ! O front idolâtré, mais fermé, - noir mystère, Plus noir que ces yeux noirs qui font la Nuit en moi, Et dont le sombre feu nourrit et désespère L’amour affreux que j’ai pour toi !
Je n’ai su jamais si tu penses, Si tu sens, - si ton coeur bat comme un autre coeur, Et s’il est quelque chose au fond de ton silence Obstinément gardé, cruellement boudeur !
Non ! je n’ai jamais su s’il était dans ton âme Une place où plus tard pût naître un sentiment,
Ou si tu dois rester une enfant, quoique femme, Une enfant ! pas même ! - un néant !
Un néant qui semble la vie ! Mais qui fait tout oser aux coeurs comme le mien ; Car l’être inanimé qu’on aime, nous défie ! On brûlerait le marbre en l’aimant ! - Mais le rien ! ! Le rien vêtu d’un corps *
* Vers inachevés, retrouvés, ainsi que les suivants, dans un très ancien cahier de jeunesse.