💃🎤 Paroles de chanson Française et Internationnales 🎤💃

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Artiste : Léo Ferre
Titre : Les Assis
Noirs de loupes, grêlés, les yeux cerclés de bagues
Vertes, leurs doigts boulus crispés à leurs fémurs,
Le sinciput plaqué de hargnosités vagues

Comme les floraisons lépreuses des vieux murs ;

Ils ont greffé dans des amours épileptiques
Leur fantasque ossature aux grands squelettes noirs
De leurs chaises ; leurs pieds aux barreaux rachitiques
S´entrelacent pour les matins et pour les soirs !

Ces vieillards ont toujours fait tresse avec leurs sièges,
Sentant les soleils vifs percaliser leur peau,
Ou, les yeux à la vitre où se fanent les neiges,
Tremblant du tremblement douloureux du crapaud.

Et les Sièges leur ont des bontés : culottée
De brun, la paille cède aux angles de leurs reins ;

L´âme des vieux soleils s´allume, emmaillotée
Dans ces tresses d´épis où fermentaient les grains.

Et les Assis, genoux aux dents, verts pianistes,
Les dix doigts sous leur siège aux rumeurs de tambour,
S´écoutent clapoter des barcarolles tristes,
Et leurs caboches vont dans des roulis d´amour.

- Oh ! ne les faites pas lever ! C´est le naufrage...
Ils surgissent, grondant comme des chats giflés,
Ouvrant lentement leurs omoplates, ô rage !
Tout leur pantalon bouffe à leurs reins boursouflés.

Et vous les écoutez, cognant leurs têtes chauves,

Aux murs sombres, plaquant et plaquant leurs pieds tors,
Et leurs boutons d´habit sont des prunelles fauves
Qui vous accrochent l´oeil du fond des corridors !

Puis ils ont une main invisible qui tue :
Au retour, leur regard filtre ce venin noir
Qui charge l´oeil souffrant de la chienne battue,
Et vous suez, pris dans un atroce entonnoir.

Rassis, les poings noyés dans des manchettes sales,
Ils songent à ceux-là qui les ont fait lever
Et, de l´aurore au soir, des grappes d´amygdales
Sous leurs mentons chétifs s´agitent à crever.

Quand l´austère sommeil a baissé leurs visières,
Ils rêvent sur leur bras de sièges fécondés,
De vrais petits amours de chaises en lisière
Par lesquelles de fiers bureaux seront bordés ;

Des fleurs d´encre crachant des pollens en virgule
Les bercent, le long des calices accroupis
Tels qu´au fil des glaïeuls le vol des libellules
- Et leur membre s´agace à des barbes d´épis.

Cette chanson est une reprise. Sa version originale a été créée par
Arthur Rimbaud