L´Europe s´ennuyait sur les cartes muettes Des pays bariolés chercheurs d´identité Couraient à leur frontière y faire leur toilette Paris n´existait pas alors ils l´inventaient
Paris claquait comme une main Sur le visage de la terre Et les clients les plus malins Venaient y lire leurs misères De Vaugirard à Levallois Des Lilas jusqu´au pont de Sèvres Paris portait sa grande croix Dorée par des millions d´orfèvres La tour Eiffel jouait aux dés Sa ridicule nostalgie Les Tuileries se démodaient Au souvenir des panoplies Et de l´Étoile au Panthéon En bataillons imaginaires Des héros passaient en veston L´esprit français faisait la guerre
Le canal Saint-Martin qui rêvait à la Seine Havre des assassins et des amants perdus La Seine s´ennuyait là-haut au Cours-la-Reine Foutant l´ camp vers Auteuil pour qu´on n´en parle plus
Clochards mendiants cour des Miracles Seigneurs patentés de la nuit Qui finissez tous vos spectacles Au rideau des ponts de Paris Émigrés d´Europe centrale Des Amérique(s) ou bien d´ailleurs Qui refaites vos initiales L´identité n´a pas d´odeur Ouvriers, Artisans, Poètes, Enfants chéris de l´amitié Enfants d´Auteuil, de la Villette O comme vous vous ressemblez
D´ la gar´ de l´Est qui se mourait Dans les fumées épileptiques Les aiguillages étranglaient Tous les requiems germaniques.
Les autos et les gens le soir à Saint-Lazare Jouaient leur grand´ passion pour des christs en képis Passagers d´occasion, visiteurs à fanfares, Le monde est trop petit pour contenir Paris.
Ceux qui changeaient à République Avaient les sangs tout retournés; Y´a des mots qui font d´ la musique Et qui dérangent l´alphabet. Car le métro à Stalingrad Roulait des souvenirs lyriques Certains en prenaient pour leur grad´
Au portillon automatique. Colonel Fabien, Bonsergent, Vocabulaire de la gloire: Petit Larousse devient grand Paris a pas mal de mémoire. Vers Opéra, vers Madeleine Discrètement s´en sont allés Ceux qui filaient encor la haine A leurs quenouilles périmées.
Débiteurs de Paname encombrés de créances, C´est au quartier Latin qu´on pointera vos "i" De Saint-Germain-des-Prés pour signer vos quittances En quelques vers français nous rimerons Paris.
Cette nuit-là Paris portait Toutes les femmes en gésine
Les gavroches qui en sortaient Au Sacré-Coeur sonnaient matines Et les aveugles de Paris Se sont pendus à ma défroque Dans leurs yeux blancs en travestis, Se reflétaient d´autres époques. Paris d´Hugo et de Villon Paris qui pleure de Verlaine, Le peuple change à la Nation Le Caporal à Sainte-Hélène Des bas-fonds de la délivrance Montait un chant désespéré La capitale de la France Réinventait la liberté liberté liberté liberté.