Paul est toujours assis seul dans le fond du bus Ses yeux, son cœur jouent à qui peut fuir le plus De bonnes notes mais zéro potes, sa présence elle-même lui suffit
Il fait en sorte que les gens portent leurs regards ailleurs que sur lui Chaque matin le même manège, il subit les moqueries des autres Croche-patte avant d´regagner son siège, et puis sur le ventre se vautre Les rires pèsent et les insultes volent une partie du trajet Mais Paul encaisse, c´est comme ça depuis l´école et rien n´a changé Paul veut manger le monde mais le monde le mange en premier Il kiffe observer les mouches et les araignées dans l´grenier Sa mère s´inquiète et l´envoie chez la psy toutes les semaines Mais Paul se tait et s´taira encore la séance prochaine
Lise est toujours la nouvelle dans la salle de classe Elle suit son père qui déménage souvent à cause du taf´ Un peu due-per, elle fume des joints solo sur le toit Le matin d´hier, elle a prit c´bus pour la première fois Paul a mit ses yeux dans les siens quand elle est v´nue à côté de lui Elle était comme le blanc d´son noir pour dessiner son côté gris Lise a senti la même folie qu´elle dans les yeux de Paul S´imaginant fuir avec lui et sécher les heures de colle Le temps passe et eux le passe ensemble, dans un skatepark vide ou dans la nature
Le soir Lise attends qu´son père s´endorme, mais part en cachette avec sa voiture Elle a récupéré Paul, ils s´en vont faire des dérapages et cramer des trucs Bidon d´essence dans le coffre, briquet dans la poche, l´envie d´tout cramer les éduque Une benne, un porche, une maison, et un jour peut-être une ville Se perdre à en perdre la raison, c´est leur raison d´être en vie Pour l´heure, la caisse du daron de Lise est la première victime Duster en flamme au fin fond d´une forêt pour scène de crime Lise a fugué d´chez elle, Paul veut l´héberger chez lui, sa mère n´a pas le choix Les deux partagent la même chambre, les mêmes habitudes, les p´tits déj´, les repas le soir
La nuit les bras dans les bras, les mains dans les mains, se connaissent sur le bout des doigts Les cœurs en feu sous les draps, quand Lise est montée sur Paul pour la première fois Plus de voiture mais toujours un bidon d´essence Amour pyromane, ils font le tour des parkings et brûlent des caisses dans tous les sens Deux dans la même soirée, puis trois, puis quatre, puis cinq Arrivent à tout cramer sans se faire cramer, priant pour que l´incendie ne s´arrête jamais Mais le matin dans le bus, retour aux croche-pattes et aux noms d´oiseaux qui fusent Lise prend la défense de Paul, les suppliant d´arrêter mais ces morveux refusent Pour la remercier du geste et la gratifier d´un cadeau de découverte Lise reçoit dans la tête une cannette ouverte et finit tempe ouverte
Du sang partout sur les habits, Lise et Paul sortent du bus direction les urgences Pour la première fois de sa vie, Paul ressent en lui la haine et la soif de vengeance Quand Lise le rejoint dehors, il lui dit qu´c´est décidé, qu´il a finit son plan Demain matin dès l´aurore, il ira cramer le bus avec les gens dedans
Mais Lise ne peut plus le suivre, lorsque elle essaye de lui dire que tout va trop loin, qu´la haine est trop vive Paul n´en fait qu´à sa tête et bouche ses oreilles comme un ado ivre Celui qui courbait l´échine, veut maintenant prendre des directives Mais Lise ne peut plus le suivre, elle dit que brûler la terre la rend moins jolie et plus maladive
Elle dit qu´elle veut voir son père, que c´est souvent lui quand son tel´ vibre Qu´il doit bouger pour le taf´, que c´est peut-être ailleurs qu´elle ira vivre
À ces mots les yeux de Paul ont prit le rôle de la pluie pour mouiller son visage C´était comme briser le sol, c´était comme partir en chutant du dernier étage En le prenant dans ses bras, Lise a fait promettre à Paul de tout laisser tomber Mais du soir au petit matin, l´envie de tout brûler ne s´est jamais estompée Arrivé devant le bus, il a versé du liquide des roues jusqu´aux rétros Zippo dans la main qui pulsent, espérant voir la panique à travers les vitraux Mais il ne savait pas que, le matin sans un bruit Lise était venue très tôt
Et pour un dernier adieu, a remplacé l´bidon d´essence par un bidon d´eau