J´vous garantis qu´c´est pas les miennes Ces heures qui tournent sur ma montre On m´a même planté dans les veines Des p´tites aiguilles de secondes
Je sais que j´vais gagner la course La fameuse course contre la honte Même si j´la trouve un peu trop douce La longue pente que je remonte
C´est difficile d´être gracieux Dans un vêtement comme celui-ci Mais j´ai d´la grâce au fond des yeux Qui tombera jamais endormie
Tant pis si l´thé est pas très chaud Si mes repas sont pas salés Je vais vider tous mes plateaux Prendre mon manteau et m´en aller
Toute ma famille a l´air inquiète Tout l´monde me traite aux p´tits oignons C´est un peu comme si c´tait ma fête
Sauf que l´gâteau est pas ben bon
J´me sens pas fort, j´me sens pas faible J´suis quelque part entre les deux En fait, j´me sens, pour être honnête Heureux mais peureux
On n’a pas l’droit d’se faire la bise Y a trop d’bactéries qui s’promènent Pis j’ai les joues déjà toutes prises En d´sous du truc à oxygène
Pour le moment, tout l´monde s´déguise Avec des gants, avec des masques Des fois, j´comprends pas tout c’qu´y´ m´disent Y´ utilisent des mots à cent piastres
Les infirmiers sont aux p´tits soins Prêts à m´aider dans tout c´que j´fais Même quand j´leur dis qu´j´ai pas besoin Y´ ont l´air de penser qu´c´est pas vrai
Ma vie tire pas à son début Mais c´est pas pour autant la fin J´suis déjà un peu moins confus Que je l´étais lundi matin
Toute ma famille a l´air inquiète Tout l´monde arrive avec des roses C´est un peu comme si c´tait ma fête Sauf que l´gâteau goûte pas grand-chose
J´pas flambant neuf, on est d´accord Mais j´pas encore tout à fait vieux J´m´abreuve d´amour et je m´en sors
Heureux mais peureux Heureux mais peureux
J´suis accroché à des tuyaux Qui sont remplis d´potion magique C´est dur de m´rendre au lavabo À l´heure des antibiotiques C´est un parcours pas très glorieux Quand j´vais du lit au robinet J´me lave les mains du mieux que j´peux J´me les savonne jusqu´aux poignets
J´veux pas passer pour un pouilleux Qui est tout crasseux en d´sous des ongles Déjà que j´ai le regard creux À peine des yeux au-dessus des ombres
Y a pas à dire, y a rien d´joyeux
Quand le miroir m´jette un reflet J´essaie d´savoir c´est qui l´monsieur J´suis même pas sûr que j´me r´connais
J´ai peur de tomber endormi De m´réveiller du mauvais bord J´voudrais pas m´perdre en cours de nuit Risquer de me tromper d´aurore
J´suis réputé pour être fort Je suis musclé jusque dans l´âme Présentez-moi la plus belle mort Que ça m´fera pas quitter ma femme
J´suis prêt à m´battre comme un tigre Je vais griffer, je vais rugir J´laisserai pas gagner la fatigue Qui, en c’moment, me fait pâtir
J´me sens pas fort, mais je m´entête Je vais tout faire pour aller mieux En fait, j´me sens, pour être honnête Peureux… Oui, peureux!
Des fois j´me sens découragé Des fois, j´ai des mauvais présages Je m´imagine qu´un préposé Me fait boire un mauvais breuvage
Que l´ciel s´amuse à m´espionner Pis à m´attendre dans l´passage Qu´si je r´garde pas des deux côtés J´vais m´faire frapper par un nuage
Je m´imagine des accidents Pendant qu´j´aurais le dos tourné
Des ponctions faites n´importe comment J´sais pas, moi... des plans pour m’ach´ver!
Pis là, j´entends la voix d´ma femme Pis j´vois l´sourire de mes trois filles C´est leur soleil qui chasse mes larmes Je r´trouve ma force dans ma famille
Pis j´me rends compte que c´est maint´nant Le meilleur temps pour être heureux Malgré tous les médicaments L´éternelle toux pis l´regard creux
Moi, je savoure le moment Je l´aime quasiment, ma jaquette bleue Tant qu´y a d´l´amour, moi, je me sens Plus heureux que peureux