Parce que sinon, j´ose pas plonger J´ai une impression de danger C´est trop profond, j´ose pas m´mouiller
Mes opinions savent pas nager
J´prends un verre
C´est ma façon d´communiquer Je mets du vin sur mes idées Et j´ai moins peur de m´impliquer Dans les discussions compliquées
J’prends un verre
Parce que sinon j´reste dans mon coin À regarder les gens de loin Se faire des drames avec des riens Se faire du charme, puis du chagrin
J’prends un verre
Parce que sinon j´réalise trop La dimension de mon cœur gros Devant le vide des mots doux Que les menteurs ont dans les joues
J’prends un verre
Et j´dois avouer qu´j´en bois beaucoup Faut bien m´dénouer le creux du cou Faut bien parler pour ne rien dire Faut bien rester pour ne pas fuir
Parce que sinon ben moi j´fais quoi Je parle à travers quel chapeau Je peste contre quel temps froid Ou je me plains de quel temps chaud
J’prends un verre
Ça me permet de mieux voir flou Je boirais même certains soirs Jusqu´à ne plus tenir debout Un peu d´ailleurs comme mon histoire
J’prends un verre
Parce que quand j´arrête de trinquer J´sais pas quoi faire de mes dix doigts J´me cherche des plats pour mettre mes pieds J´me cherche des pièges pour mettre mes pas
J´prends un verre
Car la sobriété m´affecte Et me ralentit les réflexes Lorsque j´divertis les copains
Jusqu´aux p´tites heures du matin
J´prends un verre
Car ça m´déride l´intérieur Et en général ça m´déclenche Un genre d´élan de bonne humeur Qui m´donne envie d´bouger les hanches
J’prends un verre
Parce que sinon j´resterais chez moi Emmitouflée dans mon silence Très honnêtement, j´vois pas pourquoi J´foulerais à jeun une piste de danse
Voyez-vous
Si j´suis sortie d´mes années sobres C´est pour me déboucher la vie Depuis c´temps-là qu´j´ai une belle robe Et qu´j´ai des arômes de fruits
J´prends un verre
Et j´ai dû en prendre un million Depuis ce jour de mes treize ans Où j´ai plongé mon p´tit menton Au creux d´la coupe de ma maman
Ce jour-là
Où j´suis tombée dans la potion Et qu´dans une gorgée mémorable J’suis sortie de mon p’tit cocon Et j´suis devenue, disons, sociable
Le vrai bonheur, c´est personnel Mais ça m´tente pas d´rester toute seule Alors pour vivre au pluriel J´ai appris à m´soûler la gueule
Y a bien longtemps que j´ mesure plus Le bon et le mauvais d´la chose Pour moi l´malheur, ben ça s´dilue Et le bonheur, ben ça s´arrose
Et ça agit comme du sirop Et ça m´guérit d´ma solitude Faut bien qu´j´me mêle au grand troupeau Faut bien que j´bêle des trucs absurdes
Oh je m´en cache pas, mes noyades M´ont bien souvent sauvée d´la vie
Souffrir est pire qu´être malade Autant choisir la maladie
Et j´ai le foie qui crie au s´cours Et lentement, ma robe s´use Ça pourra pas durer toujours Cette belle ivresse dont j´abuse
Faut que j´remonte à la surface Que je retourne dans mon coin Que je m´éloigne, que je m´efface Que j´dise au r´voir à mes copains
Finalement
La conclusion de ma vie brève Je la vivrai en toute conscience Je serai celle qui observe
Et ça m´rappellera mon enfance
Je s´rai seule
Je serai nue pour mon grand bal Serai à sec dans ma carafe J´irai danser dans les étoiles Et je n´aurai plus jamais soif