Avec ses p´tits pots en forme de vache Et l´bec verseur au bout d´la tache Avec ses faux fruits dans un panier Et une vraie pomme à peine croquée
Prête à rouiller là, dans l´paysage Sur le napperon parsemé d´graines Jusqu´au retour d´la femme de ménage Qui ne vient qu´une fois par semaine
Avec toutes ses jarres de confiture Sur le comptoir où se côtoient Des contenants vidés d´yaourt nature Du pain rassis, des chocolats
Avec ses bib´lots dans chaque coin Et ses tableaux sur chaque mur Avec ses cadeaux d´ses mille copains Et des photos d´leurs aventures
Avec ses souvenirs collectionnés Pour que tout l´monde se souvienne Avec ses sourires bien encadrés
Pour se parer contre la peine
Avec son frigo inhabité À force de s´porter absent Avec ses restaurants préférés Et son estomac exigeant
Le vieux garçon S´la coulait douce En rabâchant qu´on devrait tous Vivre la vie à sa façon Persuadé qu´la liberté rendait moins con
Le vieux garçon Croyait en rien Ni Dieu ni prêtre ni rabbin
Le vieux garçon était gentil
Un peu rebelle, mais bien élevé Heureux d´être seul dans son lit Pour mieux rêver
Avec toutes ses chemises égarées Qui rebondissaient dans son salon Après ces longues heures à les chercher Ce qui l´rendait souvent bougon
Avec ses vieux disques de Sinatra Qui retentissaient dès le matin Avec ses classiques du cinéma Qui ennoblissaient les comédiens
Avec cette phobie du lendemain Qui récompense tant de médiocres Et cette nostalgie d´une autre époque Dont il savait tous les refrains
Avec son mouchoir au bord d´la main Et sa vilaine toux mal soignée Avec ses multiples verres de vin Et son gosier bien arrosé
Avec, en guise de bouquin d´chevet Le plus grossier d´San Antonio Avec ses liasses de gros billets Planquées dans un Victor Hugo
Là où les voleurs, ça c´est certain N´iront jamais, les misérables Avec ses bonheurs au quotidien Bien à l´abri dans son p´tit cœur
De vieux garçon Qui s´la coulait douce
En rabâchant qu´on devrait tous Vivre la vie à sa façon Persuadé qu´la liberté rendait moins con
Le vieux garçon Croyait en rien Ni Dieu ni femme ni gamins
Le vieux garçon était gentil Un peu rebelle, mais bien élevé Heureux d´être seul dans son lit Pour mieux rêver
Et même s´il clamait qu´c´était stupide De s´empêtrer d´une routine Il prenait quand même une douche rapide Puis un café à la cuisine Il coiffait toujours ses cheveux mouillés
Avec le même peigne aux dents sales Éteignait toujours avant d´quitter Fidèle à son cérémonial
Je sais pas vraiment c´que ça prenait Pour percer son confort opaque Avec ses plus de trente-quatre balais Ça tenait vraiment du miracle
Le vieux garçon…
Y´avait quelque chose dans sa nature Qui m´intriguait et, un beau jour J´ai osé traverser la clôture Qui protégeait son puits d´amour
Cet amour qu´il ne donnait jamais Qu´à petites doses et qu´à ses potes
Un peu misogyne qu´il était Pourtant il m´a ouvert sa porte
Ça sent l´pot-pourri et les ordures Mais ça sent bon chez c´garçon-là Y´a comme une fragrance qui rassure Comme un parfum à base de joie
Même s´il est pas du genre à jurer Qu´l´invitation, demain, tiendra C´est un privilège, je le sais D´être la bienvenue dans ses bras
De vieux garçon Chez qui je couche Sans lui chambarder son décor Mais si j´y ajoute une touche Du bout d´la voix
Et des mouvements de mon corps Le vieux garçon Ne m´en veut pas Il m´écoute vivre et il aime ça
Il est mignon, il est gentil Un peu rebelle, mais bien élevé Et il m´accueille dans son lit Pour mieux rêver