Dans l´horreur d´un bois solitaire Où malgré l´oeil du jour règne en tout temps la nuit, Tirsis, loin du monde qu´il fuit, Ne pouvant plus se taire,
Chantait en pleurs le doux et triste sort Qui le livre à la mort.
C´est donc une chose arrêtée (Disait ce pauvre amant, plein d´ardeur et de foi) Que je souffre à jamais pour toi, Cruelle Pasithée ? Et que ton coeur, au lieu d´en soupirer, Feigne de l´ignorer ?
Tes beaux yeux, les rois de mon âme, Après m´avoir soumis à leur divin pouvoir, Feront semblant de ne point voir Ma vive et pure flamme ? Et ton oreille entendra sans pitié Gémir mon amitié ?
Ah! rigueur trop longue et trop dure ! C´en est fait, je me rends à ta fière merci. En vain ces houx flattent ici Mes maux de leur verdure : Il faut périr ; Amour ne m´offre en eux Qu´un espoir épineux.
Comme il achevait cette plainte, Un long cri de hibou, douloureux et tremblant, D´un mortel effort l´accablant, Le fit pâlir de crainte ; Et maint aspic sifflant autour de lui Redoubla son ennui.
Un ruisseau plein d´inquiétude, Murmurant sur le dos d´un âpre et vieux rocher Du mal qu´il avait à marcher En un chemin si rude,
Représentait le lamentable cours De ses pénibles jours.
Le tronc noir et sec d´un érable, Par le courroux du ciel foudroyé depuis peu, Ne lui présageait en son feu Qu´une fin misérable : Tous les objets y semblaient conspirer, Et lui la désirer.