Dites-moi, mesdames Du fond de votre âme Si j´ai l´air d´un grand méchant Non, les femmes, pourtant c´est vrai J´ suis un bandit, un sanguinaire
J´ l´ai appris la nuit dernière Par une dame à qui je plaisais Gardez pour vous ce secret
J´ai un petit coup d´œil assassin Ah, ne riez pas de mon chagrin C´est à perdre la tête Moi, qui m´ crois honnête L´échafaud m´ guette, c´est certain
J´ai beau réfléchir, je n´ai pourtant Dans toute ma famille que des braves gens Ma sœur est tripière Ma tante écaillère Mon papa est maire Ma mère est rosière Plaignez mon destin J´ai l´ coup d´œil assassin
J´ai un corps de fée Des traits de poupée Sans me vanter, je suis beau Mais c´ n´est pas pour ces attraits Que j´ suis aimé; ces malheureuses Qui m´ désirent sont des vicieuses Seul mon regard féroce leur plaît Je suis parfait Mais mais mais...
J´ai un petit coup d´œil assassin Ah, ne riez pas de mon chagrin Je pourrais leur plaire Par mes douces manières Ou par mon minois mutin Ce regard va m´ jouer de vilains tours Faudra, quand je sortirai un jour
Que j´ mette une housse Sur ma p´tite frimousse Ou un voilette Cachant mes fossettes Plaignez mon destin J´ai l´ coup d´œil assassin
Hélas, que de crimes Est que de victimes J´ai dû faire sans le vouloir C´est affreux. Ainsi, lundi Dans le métro, voilà qu´une dame S´écria "Tes yeux m´enflamment" Mon regard est incendiaire aussi C´était écrit J´ suis maudit
J´ai un petit coup d´œil assassin
Ah, ne riez pas de mon chagrin Il n´y a rien à faire Et la nuit dernière Ma femme soupira soudain "Oh, de grâce, Maurice, n´insiste plus Oh non, dis, j´ t´adore mais tu m´ tues Tu m´ tues, tu m´ tues, oh !" Quelle chose horrible ! Quelle nuit terrible ! Que le diable m´emporte Huit fois elle est morte Plaignez mon destin J´ai l´ coup d´œil assassin