Une de nos manies Veut qu´on glorifie Ce qui n´est pas de chez nous Toutes les choses nous plaisent Dès qu´elles sont anglaises
D´Amérique ou du Pérou Oui, je le concède Je l´avoue, j´en conviens L´étranger possède Des tas d´ choses qui sont bien Mais sans nous flatter Et sans nous vanter Ils n´ont pourtant pas en vérité Toutes les beautés de notre Paris
- Ni la Samar´ ni les Galeries - Nos monuments presque immortels - La tour Eiffel, Cécile Sorel - Le bois d´ Boulogne et ses pelouses - Avec toutes ses garden-partouzes - Enfin, notre vieille gaieté française - Le père Silvain, le père Lachaise
Ils n´ont pas ça, ils n´ont pas ça Ils n´ont pas, il faut l´ déclarer M´sieur Poincarré Madame Carré Monsieur Poiret Madame Cora Monsieur Doumergue Monsieur Domergue Ni tous les bals de l´Opéra Ni Otéro, Olida, Picasso et Picabia Chez eux, ils n´ont pas ça Ils n´ont pas ça
L´Espagne possède Grenade et Tolède Les jardins de l´Alhambra L´Italie, Venise Et la tour de Pise
L´Amérique le Niagara L´Inde a ses mystères Le Japon ses geishas Le Caire ses mouquères Et la Perse a son shah Mais malgré pourtant tout c´ qu´on peut rêver Il n´y a qu´en France qu´on peut trouver Un climat si tiède et si beau Que tout l´été il tombe de l´eau Un régime si doux, si gentil Qu´on accorde à tous l´amnistie Des bonbons et des bouquets d´ fleurs Aux insoumis, aux déserteurs Et une pension de vingt mille francs Aux bagnards les plus méritants
Ils n´ont pas ça, ils n´ont pas ça ! Ils n´ont pas la Seine et le pain
Qui, pleins d´entrain Montent chaque matin Tant qu´on n´ sait jusqu´où ça montera ! Ni la vie chère La vie si chère Qu´on ne sait jusqu´où ça cherra ! Ni des agents dont le cheval Cavale quand sonne le signal Ils n´ont pas ça, ils n´ont pas ça !
On chine, on se bêche On se blague, n´empêche Rien n´est plus beau que chez nous Nulle part on ne trouve, Votre accueil le prouve, De public meilleur que vous On peut bien vous l´ dire Ici-bas, rien ne vaut
Vos charmants sourires Ni tous vos doux bravos Jamais les Anglais, les Américains N´auront entre nous, c´est bien certain Ce petit chic bien parisien Qu´on voit dans tout, qu´on voit dans rien Ce p´tit clin d´œil qui fait qu´ sitôt On se comprend à demi-mot Ce je n´ sais quoi qui résume tout Et qu´on appelle, je crois, le goût Ce p´tit pincement, ce p´tit frisson Qui fait qu´on vibre à l´unisson
Ils n´ont pas ça, ils n´ont pas ça Ils n´ont pas cette vivacité Cette gaieté D´enfant gâtés Que Paris, toujours seul, aura
Cette bienveillance Qui récompense De tout c´ qu´on fait ou qu´on fera On dira tout c´ qu´on voudra On dira tout c´ qu´on voudra Une deux ! Ils n´ont pas ça, ils n´ont pas ça !