Toujours un vent de feu sous son haleine active, Prend plaisir à courber mon âme convulsive.
Insomnie, Théop. DONDEY.
Comme une louve ayant fait chasse vaine, Grinçant les dents, s’en va par le chemin ; Je vais, hagard, tout chargé de ma peine, Seul avec moi, nulle main dans ma main ; Pas une voix qui me dise : A demain.
Pourtant bout en mon sein la sève de la vie ; Femmes ! mon pauvre cœur est pourtant bien aimant, J’ai vingt ans, je suis beau, je devrais faire envie, J’aurais dû plaire au moins, moi, si courtois amant ; Toutes m’ont repoussé… Fatal isolement !
Ce long tourment me ronge et me déchire,
M’abîme entier ! Que le sort m’est cruel ! Même aujourd’hui, riant de mon délire, Pour retremper mon âme dans le fiel, Il m’a fait voir un jeune ange du ciel.
Ah ! quel air ravissant, quelle voix langoureuse ! Sur ses pas gracieux j’aspirais le bonheur. Je baisais son manteau d’une bouche amoureuse ; Puis, ivre du parfum que jetait cette fleur, Je sentais lentement s’épanouir mon cœur.
Que cet instant fut court ! hélas ! qu’horrible Fut mon réveil ! je la cherchais en vain De mon regard dévorant et terrible, Elle avait fui… Rends-la moi, ciel d’airain ! Jette à mon cœur cette proie… il a faim !…
Mon dépit, ma fureur bouleversent mon âme ; A mes désirs lascifs je voudrais tout plier : Égaré par mes sens, j’irais… ah ! c’est infâme ! Arracher une femme au bras d’un cavalier, J’arracherais !… mais, non, je ne puis m’oublier !
Désirs poignants, silence ! il faut vous taire. De feux en vain je me sens embrasé, Allons gémir sur mon lit solitaire ;
Baigné de pleurs mon corps est épuisé : A ce combat tout mon cœur s’est brisé !
Ma jeunesse me pèse et devient importune ! Ah ! que n’ai-je du moins le calme d’un vieillard.
Qu’ai-je à faire ici-bas ?… traîner dans l’infortune ; Lâche, rompons nos fers !… ou plus tôt ou plus tard. — Mes pistolets sont là… déjouons le hasard ! ! !