Y´avait les roues arquées un peu comme j´ai les jambes Sur l´toit et sur l´capot y´avait les deux band´s blanches, Le volant en faux bois la banquette en vrai skaï
Le klaxon qui jouait "Le pont d´la rivière Kwaï" Dédé l´avait fait r´peindre en bleu métallisé Il disait qu´ça lui rapp´lait l´ciel de son pays On n´a jamais bien su où qu´c´est qu´il était né Vu qu´il était menteur comme tous ceux de sa race.
Dans la tire à Dédé, J´en ai fait des virées. Quand j´y r´pense aujourd´hui, Sur ma mob je m´ennuie.
Sur la lunette arrière y´avait l´auto-collant Avec "Allez les verts" et sur la vitre avant Y´avait marqué en blanc sur un fond bleu d´azur "Skiez à Val d´Isère et respirez l´air pur"
Elle pompait à peu près autant d´fuel aux cent bornes Que Dédé buvait d´bières, mais faut dir´ qu´y t´nait bien. Quand on s´tapait l´Sébastopol à 220, Pour qu´les flics nous rattrapent, Y fallait qu´y s´cramponnent.
Quand Dédé en tenait un coup dans les naseaux, Bien qu´j´ai pas mon permis c´est moi qui conduisais, J´prenais qu´les sens uniques pour semer les perdreaux, Mais j´bouclais ma ceinture parc´ que j´suis pas givré. On embarquait des grosses qui rôdaient en banlieue Et qu´attendaient que nous pour s´éclater un peu :
"Allez montez les filles on s´arrache en vacances". Dix bornes plus loin on leur f´sait l´coup D´la panne d´essence.
Dans la tire à Dédé, J´en ai fait des virées. Quand j´y r´pense aujourd´hui, Sur ma mob je m´ennuie.
Mais une nuit des voyous des vrais enfants d´salauds, Pendant qu´Dédé pionçait, z´y´ont fracturé son box, Z´y´ont tiré son klaxon et son auto-radio, Ses cassettes de Mike Brant et ses jantes en inox, Dédé, le lendemain en voyant le tableau,
Lui qu´avait une santé d´académicien S´est chopé l´infarctus dont nous causent les journaux, Et l´a cassé sa pipe tout seul au p´tit matin.
Dans la tire à Dédé, J´en ai fait des virées. Quand j´y r´pense aujourd´hui, Sur ma mob je m´ennuie.
Pauv´Dédé aujourd´hui est au cimetière d´Pantin. Sur sa tombe on a peint deux band´s blanches, c´est super Sa bagnole crève douc´ment tout au fond du jardin D´un pavillon d´banlieue près d´la ligne de ch´min d´fer.
Les poules ont fait leur nid sur les sièges éventrès, La rouille a tout bouffé, la peinture et les chromes, Le pare-brise et les phares dégommés par les mômes, Il reste bientôt plus rien d´la pauv´ tire à Dédé.
Dans la tire à Dédé, J´en ai fait des virées. Quand j´y r´pense aujourd´hui, Sur ma mob je m´ennuie.