1. Elle naquit par un Dimanche, Du plus joli des mois de Mai Quand le printemps à chaque branche Suspend un bouquet parfumé ;
Et l´admirant, toute petite, Si blanche en son berceau tremblant, Sa mère l´appela de suite : "Lilas-Blanc", Mon petit brin de lilas blanc !
2. Elle poussa douce fleurette, Dans le fond d´un pauvre faubourg Et dans la triste chambrette Sans soleil et presque sans jour ; Et la voyant toujours palotte, Avec son sourire dolent, Chacun surnommait la petiote : "Lilas-Blanc," "Petit bouquet de lilas blanc !"
3. Puis quand elle eut ses douze années, Lumineuse ainsi qu´un rayon, Elle fit comme ses aînées, Sa première communion : Quand vers l´autel, d´un air modeste, Elle s´avança d´un pas lent On aurait cru voir celeste Lilas-Blanc, Un frais bouquet de lilas blanc.
4. Et puis ce fut l´Apprentissage Au cours duquel un beau garçon Remarqué souvent au passage Lui fit la cour une saison ;
Un soir, enfin, lui dit : "je t´aime !" Ajoutant plus d´un mot troublant, L´appelant : "Ma mignonne"… et même "Lilas-Blanc" "Mon brin joli de lilas blanc"
5. Mais hélas ! de l´infortunée Le roman fut bientôt fini, Car elle fut abandonnée Par son lâche et volage ami; Cacha si bien sa peine affreuse Tout au fond de son cœur sanglant Qu´elle mourut la malheureuse "Lilas-Blanc" A l´heure ou meurt le lilas blanc 6.
Mais le printemps fit un prodige Pour l´enfant qui mourut d´amour : Sur sa tombe on vit une tige De lilas fleurir en un jour ; Et son tombeau perdu sous l´herbe Est, depuis lors, une fois l´an Tout embaumé par un superbe Lilas blanc Monté du cœur de "Lilas-Blanc" !…