Ami, partez sans émoi ; l´Amour vous suit Pour faire fête à votre belle hôtesse. Vous dites donc qu´on aura cette nuit Souper au vin du Rhin, grande liesse Et cotillon chez une poëtesse.
Que j´aime mieux dans les quartiers lointains, Au grand soleil ouvert tous les matins, Ce cabaret flamboyant de Montrouge Où la servante a des yeux libertins ! Vive Margot avec sa jupe rouge !
On peut trouver là-bas, si l´on séduit Quelque farouche et svelte enchanteresse, Un doux baiser pris et donné sans bruit, Même, au besoin, un soupçon de caresse ; Mais, voyez-vous, Margot est ma déesse. J´ai tant chéri ses regards enfantins, Et les boutons de rose si mutins Qu´on voit fleurir dans son corset qui bouge ! Sa lèvre est folle et ses cheveux châtains : Vive Margot avec sa jupe rouge !
J´ai quelquefois grimpé dans son réduit
Où le vieux mur a vu mainte prouesse. Elle est si rose et si fraîche au déduit, Quand rien ne gêne en leur rude allégresse Son noble sang et sa verte jeunesse ! Le lys tremblant, la neige et les satins Ne brillent pas plus que les blancs tétins Et que les bras de cette belle gouge. Pour égayer l´ivresse et les festins, Vive Margot avec sa jupe rouge !
Prince, chacun nous suivons nos destins. Restez ce soir dans les salons hautains De Cidalise, et je retourne au bouge, Aux gobelets, aux rires argentins. Vive Margot avec sa jupe rouge !