Camille, quand la Nuit t´endort sous ses grands voiles ; Quand un rêve céleste emplit tes yeux d´étoiles ; Quand tes regards, lassés des fatigues du jour,
Se reposent partout sur des routes fleuries Dans le pays charmant des molles rêveries, Camille, que vois-tu dans tes songes d´amour ?
Nous vois-tu, revenant par les noires allées, Tous deux, donner des pleurs aux choses envolées Que l´oubli dédaigneux couvre de flots dormants, Ou dans le vieux manoir, au fond des parcs superbes, Pousser de l´éperon parmi les hautes herbes Les pas précipités de nos chevaux fumants ?
Dans les moires de l´eau dont l´azur étincelle, Nous vois-tu laissant fuir une frêle nacelle Sur le grand lac paisible et frémissant d´accords,
Où devant les grands bois et les coteaux de vignes, Glisse amoureusement la blancheur des beaux cygnes, Aux accents mariés des harpes et des cors ?
Moi, je vois rayonner tes yeux dans la nuit sombre, Et je songe à ce jour où je sentis dans l´ombre, Pour la première fois, de ton col renversé Tombant à larges flots avec leur splendeur fière, Tes cheveux d´or emplir mes deux mains de lumière, Et ta lèvre de feu baiser mon front glacé.