Camille, en dénouant sur votre col de lait Vos cheveux radieux plus beaux que ceux d´Hélène,
Égrenez tour à tour, ainsi qu´un chapelet, Ces guirlandes de fleurs sur ces tapis de laine.
Tandis que la bouilloire, éveillée à demi, Ronfle tout bas auprès du tison qui s´embrase, Et que le feu charmant, tout à l´heure endormi, Mélange l´améthyste avec la chrysoprase ;
Tandis qu´en murmurant, ces vins, célestes pleurs, Tombent à flots pressés des cruches ruisselantes, Et que ces chandeliers, semblables à des fleurs, Mettent des rayons d´or dans les coupes sanglantes ;
Que les Dieux de vieux Saxe et les Nymphes d´airain
Semblent, en inclinant leur tête qui se penche, Parmi les plâtres grecs au visage serein, Se sourire de loin dans la lumière blanche ;
Les bras et les pieds nus, laissez votre beau corps Dont le peignoir trahit la courbe aérienne, Sur ce lit de damas étaler ses accords, Ainsi qu´un dieu foulant la pourpre tyrienne.
Que votre bouche en fleur se mette à l´unisson Du vin tiède et fumant, de la flamme azurée Et de l´eau qui s´épuise à chanter sa chanson, Et dites-nous des vers d´une voix mesurée.
Car il faut assouplir nos rhythmes étrangers Aux cothurnes étroits de la Grèce natale, Pour attacher aux pas de l´Ode aux pieds légers
Le nombre harmonieux d´une lyre idéale.
Il faut à l´hexamètre, ainsi qu´aux purs arceaux Des églises du Nord et des palais arabes, Le calme, pour pouvoir dérouler les anneaux Saints et mystérieux de ses douze syllabes !