💃🎤 Paroles de chanson Française et Internationnales 🎤💃

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Artiste : Théodore De Banville
Titre : Ciels brouillés
Campagne, où sur le cerisier
Je mange à même des cerises,
Chez toi je puis m´extasier!
Mais le ciel t´en fait voir de grises.

C´est vrai, nous sommes en juillet
Par ce temps-là, sang et tonnerre!
Voici bien la rose et l´oeillet,
O vieux siècle nonagénaire!

Mais par un procédé nouveau,
Puisque, pour imiter décembre,
Le vent pleure et geint comme un veau,
J´allume un grand feu dans ma chambre.

Pluie, orage, tonnerre, éclair,
Et vous, noirs frimas que j´héberge,
Tant pis! j´allume un beau feu clair,
Un feu de forge, un feu d´auberge.

Privé de voir le doux ciel bleu,
Je mets un terme aux dithyrambes
Et, transi, j´allume ce feu,

Afin de me rôtir les jambes.

Et l´autan noir peut aboyer.
Pourtant, voyant la flamme éparse
Rougir ma vitre et flamboyer,
Les Lys disent: C´est une farce.

Lys pur au superbe appareil,
Vous dont Hugo, dans sa fournaise,
A dit: Le Lys à Dieu pareil,
Vous en parlez bien à votre aise!

Car pourquoi, par quelles raisons,
Renan l´ignore comme Taine,
Mais on voit bien que les Saisons
Courent toutes la prétentaine.

Par un délire inattendu,

(Qu´un bon coup de vin nous console!)
A coup sûr, elles ont perdu
La tramontane et la boussole.

Cachant sous leur sombre manteau
Les déluges, les pleurs, les houles,
Ces vagabondes s´en vont au
Hasard, comme des femmes soûles.

A voir leur choeur aérien
S´agiter dans le ciel qui bouge,
On songe aux danseuses que rien
Ne déconcerte, au Moulin-Rouge.

Elles vont, folles de terreur,
Parmi les nuits hyperborées,
A travers le vague et l´horreur
Et les vertigineux Borées,

Et découvrant leur mollet noir
A travers la nue impollue,
Sur leurs jambes semblent avoir
Des bas noirs, comme la Goulue.

En se tordant comme des flots,
Elles s´en vont avec des rages,
Des hurlements et des sanglots;
Et les cherchant dans les orages,

Parfois, combat mystérieux!
Dans le désordre affreux d´un rêve,
Le Soleil, astre furieux,
Les aveugle avec son vieux glaive.

Sous l´éclair de son yatagan
Elles s´en vont, dégingandées

Et c´est le sauvage Ouragan
Qui fouaille ces dévergondées.

22 juillet 1890.